SOMMAIRE DE LA CAUDRIOLE N°73
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BD HARDUIN d’AMERVAL n°1 à 63
Illustration BD : ODILON page 2
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PATRICK MERIC
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CONCOURS LIBERATION DE CAUDRY
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1°Prix OMC narration page 3
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Michelle Halluin-Piens |
1°Prix OMC Poême page 4
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Arnaud KELLER |
3°Prix OMC Poême
page 4
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Laëtitia Hollin |
Prix de la Ville
page 5
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Sandrine BRACQ |
Prix de la Base page 6
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Jean-Claude
DEFER |
Prix Jeune page 7
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Lucie
MEURANT |
CONCOURS J’ECRIS LA PAIX |
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1er Prix : La Paix page 8/9/10
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Sandra Champagne-Ilas. |
2e Prix :
Liberté page
11
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Delphine
WALBECQ |
3e Prix : C’est quoi la Paix page 12 |
Suzette
LACROIX |
Prix Caudriole : SARAH page 13
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Lucie
MEURANT |
Prix OMC : La Paix
page 14
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Adeline
LENGRAND |
ADULTES –POESIES-HUMOUR PATOIS
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Ech lapin d’septimbre page 3
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Maurice Cattiaux |
SOUVENIRS page 4
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HERTIA-MAY |
LA CRAVATE
page 5
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Maurice
Cattiaux |
UN BON CONSEIL page 6
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Jean-Luc
Menet |
L’Arbre page 7
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Saint HESBAYE |
Pensée
page 7/15/19
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Hector MELON d’AUBIER |
Le Papillon page 12 |
Reine DELHAYE |
POURQUOI page 13
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Albert Jocaille |
UN PEU PLUS HAUT page 14
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Lilou DELANGHE NOE |
La sombre Goélette page 15
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Patrick Venture |
ON M’AVAIT DIT page 16
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PASCAL |
SAM page 16
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Jean-François Sautière |
C’est un loup solitaire page
16
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Thérèse .Leroy |
LIBERATION
page 17
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Léonce Bajart |
PALETTES page 17
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Pluies
neuves |
Saut dans le vide page 18 |
Jean CASTEL |
Dis moi Au revoir
page 18
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Julien BURY |
EN CE TEMPS-LA page 11
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Bernard Simon |
Jardin secret page 19
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PASCAL |
NOUVELLES |
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A la lumière d’une Bougie
éteinte page 20&21 |
Blue Lycenne |
Le Tunnel du temps page
22/23 |
HERTIA-MAY |
DIVERS
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SALON DES ARTS
page 24 |
OMC |
SALON DU LIVRE
3°de couverture |
OMC |
* Retrouvez l’auteur dans la revue littéraire |
Concours LIBERATION DE CAUDRY 1er Prix
OMC NARRATION |
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Le 4 septembre 1944, moi, Louis M., petit Caudrésien de 8 ans, je me retrouve juché sur un blindé américain et défilant rue de St Quentin au milieu des cris de joie des habitants endimanchés acclamant nos libérateurs, j’aperçois des brassards tricolores marqués de trois lettres qui m’étaient jusqu’alors inconnues : F.F.I. Je me souviens encore, quand je ferme les yeux, de la rue pavoisée de dizaines de drapeaux bleu, blanc et rouge portant encore les plis dus au poids des piles de draps lourds sous lesquels ils étaient cachés depuis quatre longues années. J’entends la foule exulter, chanter « La Marseillaise » à tue-tête. Les rires mêlés aux sanglots de bonheur essaient en vain de rivaliser avec le cliquetis métallique des chenilles des chars sur les pavés. Ce martèlement ressemble au galop d’une harde de chevaux libérés d’un sinistre enclos. Je sens l’odeur d’essence qui m’enveloppe d’un nuage gras et le goût mentholé d’un chewing-gum offert par un GI hilare et plein de vie. Je vois son uniforme souillé de terre et sur la manche un insigne triangulaire brodé du chiffre 5 et traversé d’un éclair rouge. Les soldats jettent des paquets de cigarettes dans la foule euphorique. Certains me sourient, se penchent vers moi et me parlent avec force gestes. Je ne les comprends pas mais leurs voix graves chantent à mes oreilles comme un concerto que jouait jadis ma maman sur un piano noir et brillant. Sous mes doigts je ressens encore le granulé de la carrosserie vert olive d’un char arborant une étoile blanche sur lequel on m’a hissé. La trépidation du puissant moteur me rappelle mes jeunes années où juché, cette fois, sur les épaules de mon père, dans cette même rue, nous descendions heureux vers la Grand’ Place. Quand il se mettait à courir je riais aux éclats, je serrais encore plus mes bras autour de son cou et je frottais mon nez dans ses cheveux qui avaient la douce et bonne odeur de la brillantine. Des larmes coulent sur mes joues pâles en pensant à ce père que je ne reverrai jamais. Je me revois la nuit précédant cette journée de liesse, caché sous mes couvertures, au fond de mon lit. Je me bouche les oreilles pour tenter d’atténuer ces tirs de canon, ces lointains échanges de coups de feu, ces cris gutturaux, ces bruits de bottes qui me faisaient alors tant frissonner d’effroi. Quand enfin le matin arrive, plus aucun bruit, un silence étouffant, angoissant comme le calme étrange avant la tempête. Puis d’un coup les cloches de l’église Ste Maxellende se mettent à sonner à toute volée. La tempête attendue se transforme en explosion de joie qui se répand dans toutes les rues de Caudry. Et du fond de ma mémoire me revient un prénom, mon prénom : Samuel. J’étais l’enfant caché et je peux enfin me montrer et crier à pleins poumons : Liberté ! Michelle Halluin-Piens – CAUDRY |
Concours
LIBERATION DE CAUDRY 1°Prix OMC POEME La marche |
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Il y a tes rives piégées, Il y a ta source d’étoiles… Et sur le fleuve dévasté Je discerne comme une voile Il y a tes ruines brûlantes Il y a ta route perdue Et sur les braises ardentes Je vois errer tant d’inconnus Ils marchent, et ils franchissent Les obstacles vers l’accalmie Un seul mot les attire, les hisse Oui, c’est la liberté chérie Il y a leurs pays quittés Il y a leurs racines nues Et dans leurs peaux, la liberté Je sais qu’ils l’ont tant attendue Il y a ta jambe piégée Il y a son cœur en étoile Et dans ces vies si dévastées Je sens devant leurs yeux un voile Il marche, puis elle franchit Elle franchit, puis il marche Vers la liberté, paradis Après l’enfer, toujours ils marchent… Arnaud KELLER Evry-Courcouronnes (91) |
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Concours LIBERATION DE CAUDRY 3e PRIX OMC |
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Il y a tes rives piégées, Il y a ta source d’étoiles. Deux mondes différents Pourtant semblables. L’un, dans le tourment L’autre, avec une liberté acceptable. Comment oublier Toutes ces atrocités. Aujourd’hui, pourtant je danse J’oublie les mauvaises ondes. Hier encore, La peur habitait Tout mon corps Humilié et blessé. Les sourires sur nos visages Reflètent le bonheur De la fin de tous ces ravages Qui ont détruit nos cœurs. Nous allons reprendre nos vies, Respirer l’air Qui a cette odeur légère De liberté endormie. Ce soir, nos yeux se fermeront Avec ce sentiment de sécurité Qui nous avait été ôté Emportant nos tués Dont les paupières resteront À jamais fermées. Laëtitia Hollin Villers-Outréaux |
Concours
LIBERATION DE CAUDRY PRIX DE LA VILLE |
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Le 4 septembre 1944, moi, Louis M, petit Caudrésien de 8 ans, je me retrouve juché sur un blindé américain et défilant rue de Saint-Quentin au milieu des cris de joie des habitants, je savoure cette liberté retrouvée tant espérée et me remémore les durs moments de cette guerre. Hier les allemands nous ont fait peur une dernière fois en brûlant l’usine Mélayers et en cognant aux portes des maisons, vociférant « ouvrez tout de suite ». Caché derrière maman, je fus soulagé de comprendre que c’était juste pour réclamer des vélos afin de s’enfuir plus vite. Je suis si heureux qu’ils soient enfin partis. Il y a 4 ans, ils m’ont pris mon papa et l’ont envoyé à Königsberg en Prusse orientale, au froid, au bord de la Mer Baltique, si loin de nous. Maman nous fait embrasser sa photo sur le buffet chaque soir. Il me manque papa, j’ai eu tellement peur de ne jamais le revoir… J’ai hâte qu’il pousse la porte de la maison et me serre enfin dans ses bras ! Oh mon papa ! À quoi ressembles-tu aujourd’hui ? Me reconnaitras-tu ? Nous arrivons sur la place où nous attend une foule impressionnante par son nombre et sa ferveur. À notre passage, les Caudrésiens nous acclament comme des héros, ils célèbrent la libération de la ville, NOTRE libération. Des personnes arrachent la pancarte Kommandantur de la Mairie. Un soldat américain me donne un chewing-gum que j’avais envie de goûter. Arrivés rue de la République, maman est là et me fait signe, je la rejoins, ça fait plaisir de la voir si heureuse. Bien qu’elle ne se soit jamais plainte, ça n’a pas été facile, elle a travaillé dur pour nous élever seule. Elle a beaucoup œuvré à améliorer notre quotidien, cultivant le jardin, préparant de délicieux repas malgré le rationnement. Elle est courageuse et positive maman. Elle sait nous rassurer, et grâce à elle, mon frère et moi n’avons manqué de rien, sauf de papa. Malheureusement, tous mes amis ne sont pas là, j’ai vu des copains trembler, souffrir, certains ont perdu leur papa, d’autres camarades sont même morts sous les balles allemandes, fusillés ! Aujourd’hui, c’est à eux que je pense, ceux qui ont souffert, ceux qui ne sont plus là, qui n’ont pas la chance de vivre cette journée historique, et je profite pour eux de cette joie partagée, je fête cette nouvelle vie et crie ma joie après tant de répression ! Ma vie va enfin changer ! Demain je vais pouvoir jeter les masques à gaz qui me terrifiaient, aller à l’école Victor Hugo et sortir jouer avec mes copains au Riot sans avoir peur, aller chercher du pain salle Toflin et du beurre à la ferme sans risquer d’être enlevé par les allemands. Et surtout on va redevenir une vraie famille quand papa sera là, parce que maintenant j’en suis sûr, il reviendra ! Sandrine BRACQ – CAMBRAI |
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Concours LIBERATION DE CAUDRY PRIX DE LA BASE |
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Le 4 septembre 1944, moi, Louis M…, petit Caudrésien de 8 ans, je me retrouve juché sur un blindé américain et défilant rue de Saint-Quentin au milieu des cris de joie des habitants… Ce sont des bras vigoureux qui m’ont hissé en haut de ce puissant engin à chenilles provoquant sur les pavés un bruit infernal. Maman s’y trouvait déjà, un bouquet de fleurs du jardin dans une main, me collant contre elle de l’autre, tandis que des soldats casqués riaient sans retenue comme pour se moquer peut-être de mon air effrayé que le regard compatissant de ma mère s’efforçait d’adoucir. On me tendit alors un « truc » rectangulaire accompagné d’un sourire encourageant et d’un « bon, chewing-gum, good » suivi d’un geste orientant le « machin » vers ma bouche… - Goûte ! semble m’ordonner Maman. Le soldat sortit de son étui une espèce de pâte et me montra comment la mastiquer. Je pris goût à l’opération déclenchant un rire plutôt sonore. J’étais rassuré et observais la foule massée sur les trottoirs ne ménageant pas son enthousiasme au passage de nos libérateurs. C’était la fête ! D’autant que papa, prisonnier en Allemagne, devrait revenir bientôt. Papa ! J’étais bien petit encore lorsqu’il est parti. Une photo, de quoi ne pas oublier son visage. Maman m’a tant parlé de lui. Mais il est vivant, alors que Caudry a perdu plusieurs de ses enfants fusillés par les Allemands. Quelle horreur, la guerre ! Pourtant, avec l’arrivée de nos alliés et la fuite des envahisseurs, la vie va reprendre sans la crainte de manquer de nourriture. Maman a fait ce qu’elle a pu pour me protéger de la faim. Elle m’a même dit que je quitterais bientôt ces galoches qui me font si mal aux chevilles pour des chaussures plus confortables. - Tu es bien pensif, mon petit ! Un Américain s’est approché trop près de maman et l’embrasse sur la joue. Serais-je jaloux ? Non ! Il pose sur mon front des lèvres humides et, le char à l’arrêt, nous aide à descendre de ce perchoir majestueux. Nous sommes tout près de la place. Et là, une foule énorme acclame nos alliés. Il y a du monde sur le balcon de l’hôtel de Ville, mais aussi sur les marches : des cris de joie, des rires, des accolades, des bisous en veux-tu en voilà, des bras chargés de fleurs, des « Vive la France, vive l’Amérique, vive l’Angleterre ! », un brouhaha qui se mêle au vacarme offert par les blindés. Nos libérateurs s’apprêtent à poursuivre leur progression vers l’est, vers cette Allemagne qui nous a fait tant de mal, qui m’a empêché de profiter de câlins de mon papa. Papa ! Reviens vite ! Maman et moi avons tant besoin de toi ! Jean-Claude DEFER CAUDRY |
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Concours
LIBERATION DE CAUDRY 4°Prix OMC CATEGORIE JEUNE
LIBERTE |
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Il y a des rives cachées Il y a ta source d’étoiles Voilà ce que mon père me disait Mais sans toi je veux juste mettre les voiles Ici tout n’est que néant Au fond de moi je pleure tout le temps Sans toi mon mirage est certain Il pourra être que souverain J’essaie de rire Mais je n’arrive pas à y parvenir Ton image en moi résonne tel un écho Qui me fait éclater en sanglots Si seulement on avait vu cela plus tôt On aurait pu te guérir Tu pourrais encore vivre Au lieu de cela on te voit que sur des photos Tout le monde te voyait comme un roc Un idéal invulnérable Mais pour ceux qui te vouent un amour véritable Ta disparition est un véritable choc Ton nom est parfois galvaudé Ton souvenir dénigré Mais rien n’est plus dur que la sentence Celle qui entérine ton absence La liberté comme les êtres chers Sont le moteur de nos vies Mais on les considère comme acquis Alors leur existence devient éphémère. Lucie MEURANT –
Saint Benin |
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CONCOURS J’ECRIS LA PAIX 1er Prix La paix, bordel de merde ! |
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Dès l’aube ce qui naît
cherche son nom. Libertad bajo palabra, Octavio Paz. « Tu parles d’un sujet ! Pour écrire la paix, faudrait déjà savoir apprivoiser la guerre ». C’est mon père qui parle. Je viens de lui lire le sujet de rédaction. Notre prof de français et la documentaliste souhaitent que nous réfléchissions à la paix, mais pas que. Il nous faut la coucher sur le papier comme une fille un peu trop facile : « j’écris la Paix », voilà le sujet. Point barre. Ça a le mérite d’être court, mais le sujet est un chouia trop vaste pour moi, et le mot « Paix » me semble d’évidence trop court pour pouvoir contenir raisonnablement tout ce qu’il signifie. Comme le mot « Dieu », mot trop court lui aussi dont le sens ne cesse de se multiplier et de déborder de tous côtés, comme la pâte d’un gâteau emprisonnée dans un moule riquiqui. « Alors ? T’aurais pas le début d’un commencement d’une queue de piste à me soumettre ? Une idée originale, je veux dire. » Mon père lève les yeux de son journal. Je ne sais si l’exaspération qui se lit avec trop de facilité dans ses pupilles contractées traduit son incapacité à me répondre sur-le-champ ou plutôt mon incapacité à n’avoir toujours pas capté que le samedi matin était réservé à la lecture quasi religieuse de Charlie Hebdo, et à rien d’autre. « Écoute, ta prof te dit que tu peux faire un dessin. Eh bien, fais donc ça. » Et ses yeux retournent bien vite à la rubrique « CULturons-nous ». « Comment je peux faire mieux que Picasso ? C’est mort, je ne vais pas commencer à dessiner un pigeon bas de gamme AliExpress ! Et puis, les calligrammes, c’est bien joli quand il s’agit de pluie, de montre ou encore de cheval, mais je n’ai pas envie d’esquisser les contours de l’Ukraine avec des mots que tout le monde a déjà entendus des millions de fois… Tu comprends ? Je veux être o-ri-gi-nal. » Mon père baisse de nouveau son journal. Il esquisse un drôle de sourire, le même quand maman lui dit qu’elle va encore inviter mamie dimanche prochain, que ça lui plaise ou non… « Original, ça fait quatre syllabes, comme fiche-moi la paix. Hasard ou coïncidence, d’après toi ? » Je le regarde, interloqué. Il n’en a peut-être pas conscience, mais il est comme l’un de ces maîtres-nageurs en claquettes au bord du bassin, le torse anormalement bombé, tendant une perche, mais pas franchement à portée de main, au gosse désespéré que j’ai été pour éviter de boire la tasse javellisée, et qui font pire que mieux car plus je tendais les mains pour saisir cette perche sadique, plus ma tête s’enfonçait davantage dans l’eau piquante. « Euh, si je comprends bien, la paix, pour toi, ça signifie que je m’en aille, que je te laisse seul, tranquille Mimile, quoi… J’ai le droit de m’exprimer un minimum dans cette baraque ? » Mon père me dévisage parfaitement. Dans les années 70, il se serait pris une giroflée en pleine poire s’il avait osé parler de cette façon à son paternel, c’est certain, mais moi, la chair de sa chair, imperturbable et revendicateur, suis né en 2007, et la Convention Internationale des droits de l’enfant est passée par là, au grand dam de mon père si j’en juge les éclairs noirs strier sa rétine profonde. « Oui, ça résume bien ma pensée, si tu veux écrire la paix, faudrait d’abord me la donner. La paix, c’est la tranquillité d’esprit, c’est laisser à l’être humain l’opportunité de devenir ce qu’il a envie d’être, de faire ce qu’il a envie de faire. Comment veux-tu mettre cela en dessin ? » Il s’interrompt un moment, puis reprend, bouleversé. « Cabu aurait pu, remarque. C’était un grand, lui, mais il n’est pas mort en paix, dans son lit, entouré de ses potes. Non, lui et ses amis, c’est la Grande Saloperie de Faucheuse assassine qui les a surpris et massacrés en plein travail, comme ça, un banal mercredi d’un banal mois de janvier. » Les sons de sa voix expirent, pour reprendre avec plus de gravité. « Écris sur la guerre, la paix coulera, pas forcément de source, mais elle trouvera son chemin, et elle ruissellera à un moment ou à un autre, ça ne peut être autrement, ça ne peut finir que comme ça. Depuis le début des temps, l’homme s’est spécialisé dans les guerres qu’il mène contre ses semblables. Il aime ça, tuer, massacrer, violenter. Certains prétendent que c’est le désœuvrement qui l’a poussé à commettre les pires atrocités imaginables car l’homme ne saurait tenir en place. Il ne sait pas vraiment qui il est, ne parvient pas à empêcher son esprit de tourner à vide, il lui faut de la nourriture virile, une sorte d’ambroisie et de nectar pernicieux pour l’apaiser, il lui faut du pouvoir, il veut repousser les limites hors de sa petite boîte crânienne, il veut changer la physionomie du monde, des frontières, il veut faire du bruit pour se sentir exister, pour gonfler encore plus son égo baudruché à mort. Voilà, écris la guerre pour écrire la paix. » Mon père se penche, saisit l’anse de sa tasse, et avale une gorgée de café froid. « Ce sujet est complètement con », finit-il par lâcher. « C’est la documentaliste qui en a eu l’idée. Avec tout ce qui se passe en ce moment, le bordel que Poutine fout en Ukraine, les Ouïghours, l’Afghanistan, la Syrie, les missiles de Kim Jong-un et j’en passe, elle et les élèves du club journal trouvaient intéressant qu’on se penche sur ce thème en cours de français… » Mon père laisse flotter un instant ses idées en fixant le mug. Dessus sont dessinés Snoopy assoupi comme toujours sur le toit de sa niche, et Woodstock assis sur son ventre rebondi. Ils ont l’air bien tous les deux, sereins. Mon père murmure : « Ton arrière-grand-tante a fui Franco. Ton arrière-grand-père a fui la Yougoslavie. Mes grands-parents ont subi l’oppression allemande. Ma grand-mère a connu l’exode, traversé une forêt, celle de Saint-Amand sans doute, et a vu le visage en bouillie d’un soldat. Cette image l’a hantée toute sa vie. Depuis que je suis né, on ne parle que d’attentats, de tours qui s’effondrent, de famine et de guerres, de fillettes violées, de femmes martyrisées, d’hommes torturés, emprisonnés à vie dans quelque lieu sordide d’où ils ne partiront jamais que les pieds devant. De la tragédie pure dans mon quotidien « tranquille Mimile » comme tu dis. Je suis désolé, je ne peux simplement pas te dire comment écrire la Paix. C’est comme l’Art, ça devient une abstraction inatteignable pour le simple esprit que je suis. Et plus tu vas vouloir cerner ce concept, moins bonne sera ta production. Je dirais que la Paix, ce sont les branches d’un arbre et que la Guerre est les racines de cet arbre. Pas l’inverse. À ton âge, je croyais que c’était l’inverse, je me suis bien gouré. L’homme est un animal guerrier par excellence. Il est devenu beaucoup plus perfide depuis l’invention de la bombe A. C’est là que tout a basculé, l’invention de la bombe atomique et aussi celle d’Auschwitz, cette création abominable issue de cerveaux malades. Günther Anders l’avait bien compris, et cette arme nucléaire, c’est comme une menace permanente au-dessus de nos têtes si humaines, si fragiles… Si j’étais toi, je dessinerais une grosse épée bien tranchante, un peu comme celle du pont de l’épée qu’essaie de franchir le pauvre Lancelot, une épée fatale prête à tomber lourdement comme un couperet sur nos têtes minuscules… » « Et tu crois qu’une épée illustrerait à merveille le thème de la Paix ? Pas sûr que la doc et la prof captent l’ironie du truc… » « Pourquoi pas ? Ulysse a bien dû dégommer tous les Prétendants pour retrouver la paix, son honneur, et accessoirement sa femme. Et il n’était pas seul dans cet excès de fureur, le sage Ulysse. Il était accompagné de son porcher, de son bouvier, de son fils Télémaque, et même de la déesse Athéna ! Et ils se sont déchaînés contre des hommes désarmés, mais pas que. Tu sais ce qu’il a fait ensuite, l’ingénieux Ulysse ? » Je suis suspendu aux lèvres de mon père qui ne se sont jamais autant animées. « …il a fini par convoquer sa nourrice Euryclée, et il lui a demandé comment s’étaient conduites les femmes en son absence. Puis le mec – le même qui suppliait à genoux au cyclope Polyphème l’hospitalité si chère aux Grecs – lui demande tranquillement d’établir une liste avec, d’un côté, les femmes qui l’ont déshonoré et, de l’autre, celles qui n’ont rien à se reprocher. Peu importe que celles qui ont couché avec les Prétendants y aient été forcées. Elles sont condamnées, et c’est Télémaque qui pend ces malheureuses douze femmes à la corde d’un navire. Alors, toujours aussi grandiose, l’épopée d’Ulysse ? Toujours aussi sympathique, le grand héros de Troie ? C’est bien ce que je dis. Même un grand homme au destin prestigieux et aux proportions mythologiques peut devenir le plus ignoble, le plus monstrueux des bourreaux. Regarde Pétain… » C’est la première fois que j’entends quelqu’un établir une pareille comparaison ! Je la soumettrai sans faute lundi prochain à mon prof d’histoire. « Comment je fais alors avec ce sujet ? Ça me gave grave. Je commence sérieusement à haïr la documentaliste et la prof ! » Mon père éclate de rire : « Tu vois ! Même la simple idée d’un sujet imposé dont la réalisation demeure une énigme te fait monter la moutarde au nez ! C’est ça la paix, c’est le grand néant, quand il n’y a plus personne pour t’imposer quoi que ce soit. Même pas demander à quelqu’un qu’il t’apporte une tasse de café chaud. C’est déjà le début de la contrainte, d’une violence minimaliste faite sur autrui, n’est-ce pas ? Les ados en particulier ne supportent pas la contrainte. On ne peut rien leur demander, on a l’impression de leur demander de gravir l’Everest en 24 heures en sandalettes. Alors, écrire sur la paix, désolé, ça me fait rire. Je pense que ce sujet est une provocation et je pense que tu devrais faire un bête poème avec des mots-clés comme liberté, fraternité, nature renouvelée, beauté… Et dans la foulée, relis tes classiques, Aragon, Eluard, Desnos, Guillevic : « Sœur du chaos / Rends-nous la nuit / Pour le sommeil. Tout a déjà été écrit. » Je soupire bruyamment. Lui aussi commence à m’entortiller les nerfs. Il me semble qu’il a raison mais, en même temps, sa démonstration ne me convainc qu’à moitié. « Je ne dessinerai pas d’épée, papa. Et je ne veux pas pomper dans les poèmes de la Résistance. La prof va vite s’en rendre compte, et je vais me taper une piteuse. Non, je veux faire quelque chose d’intelligent, qui ait du sens. » Mon père jette un œil au dessin de Riss qui s’étale à la une de son journal préféré. « Si tu veux écrire, dessiner, un conseil, abandonne l’intelligence, crée avec tes tripes. L’intelligence viendra après. » Après un long silence, je lance : « Tu sais, j’aime bien l’idée de l’arbre, les branches, les racines. Tu as raison, la paix n’existe que seulement parce que la guerre existait avant elle. Elle la précède toujours. La guerre est à la lumière ce que la paix est à l’ombre projetée par cette lumière existante. J’ai envie d’écrire sur cet antagonisme, ces sœurs siamoises dénaturées. Comment peut-on les séparer, séparer l’ombre de la lumière ? Comment faire pour que l’ombre balaie définitivement la lumière nucléaire, et qu’elle devienne la nouvelle lumière ? Comment enterrer à tout jamais la lumière aveuglante provoquée par l’explosion atomique ? Comment je vais pouvoir écrire la paix alors que Little Boy a provoqué des dizaines de milliers de morts, de blessés, de radiés, d’orphelins ? Une seule bombe a réussi à décimer l’espoir, c’est dingue… » « Pour approcher la paix, il faut cerner le mal, l’appréhender au plus près. Quand on le tient en vue, il ne faut plus le quitter des yeux, et le surveiller comme du lait sur le feu. Le plus dur, c’est quand le mal nous glisse entre les doigts, qu’il est invisible, tapi derrière des masques de fausse indifférence. On ne sait plus à qui s’en prendre… Alors, on a recours à des symboles, à des tableaux allégoriques. Comment peut-on faire autrement ? La réalité est tellement moche et absurde ! La Mort ressemble à une espèce de mort-vivant erratique tenant une faux, elle-même hautement symbolique, et la Paix est enfermée dans un sac de plumes portant un rameau d’olivier. Les noms des morts victimes de la folie d’infrahumains s’étalent sobrement, tragiquement, sur une plaque commémorative. Les mémoriaux sont faits pour ça, pour que l’esprit humain ne s’habitue pas trop à la paix, pour que la guerre et ses conséquences soient toujours présentes en nous. Par exemple, le Dôme de Genbaku est une projection de la volonté d’une paix durable en ce bas-monde… Écris un poème symbolique. La guerre est partout, même dans la nature. Mais la paix niche en elle, la paix est une guerrière elle aussi, faut savoir la flairer et la débusquer. » Et il avale de nouveau rapidement une gorgée de café gelé. Je regarde mon père, il a soudain l’air d’un petit garçon avec ses épaules rentrées en dedans. « Je crois comprendre un truc, papa. La paix, c’est aussi quand je me suis réconcilié la semaine dernière avec Lakdar. Et puis, c’est aussi quand mon prof de maths m’a souri hier en me rendant mon DS. 17 en algèbre ! Jamais eu une note pareille ! J’ai ressenti une sorte de joie en moi. Je me sentais en paix avec moi-même. J’avais aussi retrouvé l’amitié de mon pote. On s’était frités sur la question de la guerre en Palestine, et on a décidé que c’était bête de s’engueuler pour un conflit qui durait depuis des années, qu’on n’y était pour rien. On a décidé de ne pas devenir les boucs-émissaires des faiseurs d’Histoire. On s’est pris dans les bras, papa ! Oui, c’est ça aussi la paix, pas avec un P majuscule qui tétanise, mais la paix qui s’installe en nous pour un temps indéterminé et qui finit par nous quitter un jour. Et toute notre vie durant, notre volonté, comme un filet à papillons, consistera à attraper ces petites paix aux ailes fragiles et à la respiration éphémère qui nous font oublier un temps l’épée au-dessus de nos têtes… » Papa me regarde en souriant, les yeux brillants. « Tu as bien grandi, mon coco ! Maintenant, laisse-moi finir de lire cet article passionnant de Philippe Lançon, file me chercher un café chaud, et ensuite, bordel de merde, fiche-moi enfin la paix ! » Sandra Champagne-Ilas |
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CONCOURS J’ECRIS LA PAIX 2e Prix Liberté, sérénité, Paix : revenez nous calmer ! |
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Pour soulager mon regard aveuglé d’horreurs, Mon ouïe assourdie de cris de frayeurs, de peurs Revêtir sous l’œil d’un ciel bleu La robe d’une colombe offerte par les cieux Immaculée, rayonnante de mille feux Arrêtant tout, des guerres, des bombes, des conflits trop nombreux Portant son rameau d’olivier Chantant le retour de la fraternité Tendre l’aile, pour en saisir un bouquet de mariée Volant l’instant, celui d’un baiser, sous l’arbre dissimulé D’un vol tranquille capturer les rires d’enfants Se jouant des herbes tendres, du vent D’un battement de légères plumes, relever la tête De soldats obligés, tombés, fatigués Rêveurs à temps plein d’une douce liberté Avoir la possibilité de les bercer d’une blanche sérénité Parfumer le monde d’une douce équanimité propagée D’une main à l’autre, par un regard, Aux vibrations d’une musique et de ses notes Paix dites-moi où vous êtes-vous dissimulée ? Les hommes ont bafoué votre nature, votre bonté Préférant éclats de voix, de force, À vos chants mélodieux À quoi servent les « symboles » Si jamais ils ne sont respectés Sachez Dame Paix, qu’au creux de mes paumes fébriles Je chuchote d’une larme claire, salée au goût des mers Des mots éphémères et vous prie chaque jour, éblouie par l’envie de votre lumière D’engendrer votre pouvoir au sein de notre terre. Delphine WALBECQ |
CONCOURS J’ECRIS LA PAIX 3e Prix Si un enfant me demande : « c’est quoi la Paix ? » Que vais-je lui répondre ? |
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« C’est un mot abstrait qui, comme une multitude d’autres mots, exprime un ressenti, tels le temps, le vent, le bonheur, la joie, l’amour ; une chose qu’on ne peut pas voir, ni toucher, ni manipuler, mais que l’on reçoit dans l’esprit et dans le cœur, qui nous aide à mieux cerner notre environnement. Ceux que je viens de citer sont agréables à entendre mais d’autres, comme le malheur, la maladie, la malchance, la malhonnêteté, la malveillance, sont beaucoup plus dérangeants. D’ailleurs, ils commencent tous par MAL ; il faut les oublier ! Donc, tu comprends que le mot Paix se trouve dans la bonne liste qui exprime le bien, le beau, le bon. Je vais également te citer quelques expressions qui ne peuvent que satisfaire celui qui les reçoit : -Faire la paix avec un ami, c’est convenir ensemble de ne pas avoir de rancune après un malentendu ou une dispute et se promettre de maintenir de bonnes relations. -Avoir la conscience en paix, c’est n’avoir rien à se reprocher, être correct et ne pas nuire à tous ceux que nous rencontrons à l’école ou tout au long de notre vie. -Avoir la paix, signifie qu’on désire trouver le calme et la sérénité en exécutant un travail minutieux ou important, en lisant, en écoutant de la musique ou simplement se reposer. -Qu’il repose en paix, est une métaphore pour dire que quelqu’un nous a quitté pour toujours et qu’il n’est plus possible de le déranger en parlant de lui avec nos regrets et nos rancœurs. Je pense que tu as bien compris comment ce joli mot si petit et si banal est indispensable et précieux pour le bon déroulement de notre vie, afin d’affronter les conflits, les catastrophes, les guerres ou les maladies qui peuvent survenir à tous moments. Que sa force soit ancrée à ton cœur et te rende heureux ! Au nom de la PAIX je te souhaite d’être toujours bon, juste et courageux ! » Suzette LACROIX |
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CONCOURS J’ECRIS LA PAIX Prix Caudriole : JE M’APPELAIS SARAH |
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Je m’appelle Sarah, j’ai 12 ans Je vis à Paris, une ville que j’aime tant Mes parents sont formidables, mes frères géniaux Ma vie est cocoonée comme protégée par un moelleux manteau Bien sûr, je sais que la guerre est présente Qu’elle contrarie les adultes et même les hante Pourtant moi, je ris toujours avec mes amis J’en oublie donc la peur et les ennuis Juillet 1942, tous mes repères basculent Mes copains disparaissent, dites-moi que j’affabule ! Je sors prendre l’air, j’étouffe Je rentre et là, mon avenir fait plouf Mes parents et mes frères ont disparu Tout est intact, il reste même de l’argent sur le bahut Je pleure quand soudain, un bruit me fait tressaillir C’est notre vieille voisine qui vient me secourir Elle me cache dans un placard pendants quelques jours Puis un homme m’emmène, je pars le cœur lourd Sur la route, il me livre des consignes cinglantes comme la pluie Je ne suis plus Sarah mais désormais Annie Où sont mes parents ? Mes frères ? Les a-t-on oubliés ? Pour seule réponse, il me dépose chez des fermiers Deux autres enfants sont là, l’un d’eux me sourit Je comprends à cet instant précis combien va changer ma vie Pierre est bourru mais Marie est gentille Ils prennent soin de nous même si parfois, avec le travail, je vacille Changement d’identité, obtenir de nouveaux papiers C’est malheureusement le seul moyen d’être sauvé 8 mai 1945, aujourd’hui j’ai 15 ans J’aime ma nouvelle famille tendrement La guerre s’en est enfin allée Pourtant, je sens en moi un vide m’emporter Tout le monde chante, danse et rit Je copie même si des larmes roulent sur mes joues rosies Je suis libre, je devrais aussi sauter et exploser de joie Mais je pense à mon foyer d’antan, j’entends leurs voix Comme un signe, une colombe s’envole juste devant moi Est-elle vraiment là ? Ou n’est-ce que moi qui la vois ? Sa beauté et la blancheur de ses ailes me redonnent espoir Les personnes que j’aime m’accompagnent, en ça, je veux croire En ce mardi, je peux sourire à nouveau Mes anges gardiens me font un magnifique cadeau Il faut vivre à fond chaque seconde de Paix Si précieuse et pourtant si fragile même à la chaleur de l’été Toujours, je m’engage à honorer les valeurs de la Paix La non-violence, la solidarité, la tolérance et le respect Cependant, de nombreux hommes ne pensent qu’aux batailles et aux conflits Alors s’il vous plaît, tentons de protéger notre paix tous unis Merci. Lucie MEURANT |
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CONCOURS J’ECRIS LA PAIX Prix OMC La paix |
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Depuis toujours, des hommes et des femmes de toutes origines, de toutes nationalités, des personnes que tout oppose, que ce soit par leur religion ou leur culture, se battent pour un rêve commun. Ce rêve qui d’après moi représenterait l’antidote à tous les maux dont souffre notre monde : la paix universelle. Cette paix qui pourrait unir les nations et les communautés, les lier entre elles pour leur permettre de marcher main dans la main dans un but commun. La richesse du cœur primerait sur les richesses matérielles dans un futur où la guerre paraîtrait absurde tant elle aura engendré des souffrances inutiles. Nous en sommes témoins tous les jours, cela ne vous lasse donc pas ? D’entendre ces cris de douleur, de voir toutes ces larmes, toutes ces vies réduites à néant pour des luttes qui n’aboutiront jamais. Les hommes de notre ère tentent d’imposer leur vision de la paix, mais la plupart du temps ils détruisent plus qu’ils ne guérissent. Alors, avons-nous seulement le droit d’espérer qu’un jour ce rêve se réalise ? Ou est-ce purement et simplement une utopie sans avenir ? Chaque homme possède indéniablement en lui une part de mal, d’ombre qu’il ne peut ignorer. La nature humaine est faite de sorte que l’être humain parfait n’existe pas et n’existera jamais. Nous sommes capables du meilleur comme du pire. Cependant, cela ne justifie en rien nos actes, votre conscience ne vous inspire donc aucun remords ? L’inconscient de certains comportements est révoltant, tout simplement parce que nous n’en subissons pas personnellement les conséquences directes. Ce sont les autres qui les endurent dans la souffrance. Comment supporter cette injustice ? On peut se dire que cette lutte est vaine et que nous ne serons jamais sauvés, mais moi j’ai envie de croire à ce monde meilleur. J’ai envie de faire partie de ces gens-là qui se battent pour faire changer les choses car rêver ne suffit pas, c’est à nous, jeunes adolescents et jeunes adultes, d’agir pour notre avenir et celui de nos enfants ainsi que pour toutes les générations futures qui naîtront dans un monde fait de douleur et d’injustice qu’ils n’ont en rien souhaité. Nous avons toujours cherché ce qui nous divise, mais pourquoi ne pas chercher ce qui nous rassemble ? Je suis persuadée que si chaque personne avait, ne serait-ce qu’une once de bonne volonté, qui agisse de manière bienveillante à travers ses actes et ses paroles envers autrui, au lieu de s’occuper constamment de son confort et de son propre bonheur, un grand pas en avant serait déjà fait. Peut-être même que cela serait suffisant pour répandre un peu de paix, notre paix, par l’apprentissage de l’entraide, du respect, de la tolérance et de l’acceptation de l’autre. Je suis sûre que le changement de mentalité peut être un moteur majeur dans la mise en place de changement futur. Chacun à son échelle peut agir de manière différente, mais dans un même but. Adeline LENGRAND |
Ech lapin d’septimbre |
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Tous l’ s’ ins, in septimbre Un tiot lapin y buque à min huis -Ch’est l’ouverture de l’ cache -Et t’os peur qu’in t’mette dins chelle fricasse -Ej peux intrer dins tin gardin ? -Ouais, mais te laiche tout in plache. Mais, al fin de l’saison d’ cache Ch’est incor toudis l’ même canchon Y a mingé mes salat’s Mes carot’s, m’ n’ oselle J’in sus malate J’ li tire ses orelles Y m’ ravise tout pêteux Pis y m’ dit : « T’aros quin même pos l’ coer D’acater un fusique ? » Maurice Cattiaux |
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SOUVENIRS |
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La pâleur des siècles ensablés Recouvre lentement les cernes de la ville Mon pays est un château de fleurs Dressé dans les nuages Je l’ai quitté enfant Pour la poussière des chemins gris. La torpeur des soucis humains Recouvre lentement les cernes de la vie Mon pays est un calice de rose Dressé dans le soleil Je l’ai quitté enfant Pour la grisaille des matins froids. HERTIA MAY |
LA CRAVATE |
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Elle est pas ordinaire La cravate de grand-père Rouge à pois verts L’inverse n’est pas possible Il n’y a que dans la mer Que les petits poissons rouges. Maurice
Cattiaux |
UN BON CONSEIL |
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Quind j’dallos à l’école et pis qu’i’avot del’ casse, Qu’in étot tros garchons qui s’batot’nt à l’récré, Ch’étot bin souvint mi qu’i’étot l’pus machucré : Em’ tiête, elle arsonnot à eun bol ed’ fricasse. Min père, in tiot gaillard qu’i’aimot cacher l’bécasse, Au lieu d’les artrouver pou les défigurer, Ou d’aller vir el’ maît’, m’disot comme eun curé : « Mouqu’ tin nez, habil’te et vas-t-in à l’ducasse ! » À ch’t’heur’ qu’j’ai bin compris qu’ch’étot eun bon consel. Jé l’sieux comme eun’ parol’ qu’in peut lir’ dins l’Missel Et chaque fos jé’m’sins comme un noïé qu’in ranime. Quind j’sus tout débousé, quand j’ai d’mau à mes dints, Ou tou’s les fos j’archeux eun’ bielle lett’ anonyme, J’mouqu’ min nez, j’mets m’paltot et j’min vas à m’gardin Jean-Luc Menet |
PENSÉE |
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- L’ote jor, euj rinte à pieu é lange eul cim’tieur, ché alorse qué
tros jones files meu d’minde eud’
lé accampagneu pace qu’all ont péieur
ed passeu ch’eul nuit pad’vint eul cimtieur ! euj’leu dis qu’mi chétot pareul quind j’étos vivint ! jé jinmeu vu quéqu’in ceurir ossi vite ! L’autre jour, je rentre à pied et je longue le cimetière, c’est alors
que 3 jeunes filles me demandent de les accompagner car elles ont peur de
passer la nuit devant le cimetière ! je leur dis que moi c’était pareil
quand j’étais vivant ! jamais vu quelqu’un courir aussi vite ! Hé tiote, jé fé
in rèfe… tos ché cans y z’avotent quitteu ch’eul planinte, alorse euj’m’artrouvos tot seu come in can ! pis donque, jé fin-ni pas alleu eus
z’arjointe ! – campleut’mint can, tin rèfe !!! J’ai fait
un rêve… Tous les cons avaient quittés la planète,
alors je me retrouvais tout seul comme un con ! Donc j’ai fini par les
rejoindre ! -
Complètement con comme rêve !!! Bin tiot, quoqu’te fé aveuc eut’ fichelle ? - J’vas suichideu,
j’eun’ veux pus vife !
- mé t’eun sé
pon qu’y a inn vie apreu ch’eul mort ? - ah, ban ! cha’n’seurt
à rin alorse ! Eh, bien,
petit, qu’est-ce que tu fais avec ta ficelle ? – je vais
me suicider, je ne veux plus vivre ! – Mais tu
ne sais pas qu’il y a une vie après la mort ! – ah,
bon ! ça sert à rien alors ! - Tos lé
z’ins y a ed pus in pus eud cans, mé
j’cros bin qu’ché cans eud l’in prochin y sont d’jà là ! Tous les
ans, il y a de plus en plus de cons, je crois que les cons de l’année
prochaine sont déjà la ! HMA |
Le papillon |
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Vole
papillon, envole-toi ! Vole
papillon, par-dessus les toits. Emporte
nos soucis, Apporte-nous
la vie. Vole
vers le soleil, Sans
te brûler les ailes. Vole
plus haut si tu peux, Envole-toi vers les cieux. Tu
es beau, tu es léger, Et
te voir nous fait rêver. Quand
tu déploies tes belles ailes, On
croirait voir de la dentelle. Ne
te laisse pas prendre dans les filets, Vas
bien plus haut et tu pourras te sauver. Libre
tu es, libre tu resteras, Et
à tout jamais tu voleras. Reine DELHAYE |
POURQUOI |
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Pourquoi faut-il enfin Depuis que ce monde a commencé Que l’homme ait toujours tant besoin De la guerre et ses calamités ? Pour devoir croire en son destin Et ne faire que tombeaux en cette humanité ! Albert Jocaille |
L’ARBRE |
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L’arbre ne sait pas Qu’on l’appelle arbre Il est lui-même arbre L’arbre de l’homme L’arbre du péché Comme arbre de vie Mais aussi arbre de Toi Comme arbre du ciel De ton argile d’arbre Aux arbres de racines Les insectes de l’arbre S’évertuent en arbres L’arbre de l’hiver Pour l’arbre sans feuille Pleurant un cœur d’arbre Dans un ciel d’arbres. Saint Hesbaye |
La sombre goélette |
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La sombre goélette est là, près du rivage. Les rames de la chiourme ont cessé leur cadence. Sur la terre d’Afrique, ils palabrent, ils dansent. Profitant de la nuit, on cerne le village. Les enfants, aux mères, sont soudain arrachés. Les chiens et les vieillards sont passés par les armes. Les cases sont brûlées dans un torrent de larmes. Les hommes sans défense sont vite attachés. En ce funeste jour, noir est le pavillon. Des côtes de Guinée jusques au Mozambique, On pille, on viole, on bâillonne l’Afrique. Loin de leurs cases vides, ils voguent en haillons Vers d’autres continents ils souffrent en silence. Dans les champs de coton ou les mines d’argent, On flagelle leurs corps maigres et indigents. Les griots se sont tus, disparue l’indolence. Là-bas, loin de leurs terres, dans les soirs mordorés, Montent des plaintes sourdes et des chants nostalgiques. Leurs rêves sont peuplés de souvenirs tragiques Que confortent les coups de maîtres abhorrés. Reverront-ils un jour le lieu où ils sont nés ? Entendront-ils encore le tam-tam dans la brousse ? Poursuivront-ils encore dans la savane rousse Le phacochère gris dans des courses effrénées ? Le soir quand tout est calme, ils parlent du pays, De leurs pauvres récoltes mais celles d’hommes libres. Leurs mémoires s’estompent mais leurs cœurs défaits vibrent Quand l’un rappelle aux autres leur lointaine patrie. Patrick Venture –
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UN PEU PLUS HAUT |
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Malgré les nuages Malgré la pluis Malgré l’orage Malgré la tempête J’atteindrait les
étoiles Lilou DELANGHE NOE |
ON M’AVAIT DIT |
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On m’avait dit que tu m’aimais. Alors j’ai cru à cet enfantillage Et écouté encore ces babillages, Ces mots doux, au vent, semés. Je me suis envolé de ma falaise Pour bien apprivoiser tes yeux, Je planais à toutes ces fadaises. Enfin, j’osais toucher les cieux. Sans chute, je croyais mon vol, J’étais bien fort, j’étais Arcole ! J’étais au zénith, j’étais si haut, Enfin médaillé, j’étais ton héros. J’ai volé, oui, j’ai volé un peu, J’ai navigué dans mon ciel bleu. Pour moi, tu étais la plus belle Mais ton Soleil brûlait mes ailes… J’ai dû… ta jeunesse, offenser, J’ai commencé à tomber alors Et je ne savais plus où penser. Si le temps pèse, je le déplore. À ce corps, je fais allégeance, Il me fait mal, crie vengeance. Je noie le temps en profondeur Et j’enterre mes restes de cœur. On m’avait dit que tu m’aimais, On m’a trompé, oui je l’admets. Pour une œillade, une révérence Mon cœur se taira sans cadence. Les nuits sont longues sans terre Sans toucher un port de plaisir. Mes îles se parfument de désert, Sans nulle envie, sans nul désir. Ne jamais croire des mensonges Même quand ils nous arrangent. Le mal est bien là et il me ronge. Amour, tu es un sentiment étrange. Pascal |
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SAM |
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Dis-nous, Sam, y a-t-il un paradis Au pays des chiens, compagnons de l’homme, Juste un petit coin pour vous autres, dis, Qui finirait bien votre vie, en somme ? Quand tu as toussé, j’ai vu ton regard. « Hélas ! Il est vieux, cœur gros, rien à faire. Nous allons tenter… » mais c’était trop tard. C’est ce qu’il a dit, le vétérinaire. Alors on t’a mis au fond du jardin, Près des fleurs, couvert d’une pierre plate : Ainsi, sur toi les chats ne lèveront pas la patte ! Et tu gardes pour nous ton air de noir coquin. Jean-François Sautière |
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C’est un loup solitaire |
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Dans sa maison se terre Il vit de souvenirs À ne pas souvent rire Et tout ce qu’il écrit Se finit dans un cri. Autour de son jardin Occultant ses voisins A dressé un haut mur Pour panser ses blessures. Amertume est son cœur Et son corps est douleur Ne sait pas la douceur D’une seule âme sœur. À ses yeux quelques larmes Sont là ses seules armes. Pour lui j’ai tant de
peine Car je le sais sans haine Abandonné des siens Comme on rejette un chien Et je sais que jamais Ne pourrai l’oublier. T.Leroy |
LIBERATION Partie d’un poème écrit à la libération de Caudry en septembre 1944 |
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In n’verra pu Vichy saquer des terlouzines Pou fair’ croire à tertoutt’ équ’ du blinc c’est du noir, Invinter mill’ décrets, camoufler les combines, Fair’ braire el Maréchal pou tâcher d’nos avoir. Mais l’Frinçais, qu’iest futé, ia ri d’leus mintiries Malgré l’trique et l’prison et tout leu saint-frusquin : El pon noir, l’z’homm’s traqués, la r’lève et Niergnies, I s’est toudis r’vingé, ia t’nu pindint quatre ins. Ia t’nu dins tout l’ Pays, quimpé dins l’ Résistince, Répondint à de GAULLE qu’iaveut parlé pour nous, Ajo-int l’bo momint d’combatt’ pou l’délivrince El Frinçais fut trahi mais n’s’est po mis à g’noux ; Et comme inn’ miette à l’feus, in s’ermetteut su z’armes Bourdan et ses amis iont sout’nu no espoir Et nos avons souvint versé des bonnes larmes Quind, ayint frimmé l’huis, in l’z’acouteut au soir. Si l’Frinçais ia su t’nir, c’est qu’iest pou l’République Et qui veut, avint tout, avoir ess Liberté C’est qui n’veut po marcher pou ett’ conduit à l’trique, Et qu’aveuc el Justice i veut d’el preuperté. Pu jommais in n’dira qu’in n’a ré à définne, Nos avons vu d’tout près Hitler et l’gestapo ; Sin pon et s’liberté, feut po l’z’é laisser prinne C’est l’jour qu’in l’z’a perdus qu’in sint sou qu’in n’a po ! Mais combé d’peuvers gins iont connu d’el misère Et les s’monnes sins burre et pi l’minque ed carbon, Et combé d’nos infints iont vu songer leu mère Quind iaveut pu d’tickets pour ieusse avoir du pon. Jommais in n’dira d’trop l’grind calvaire des fimmes Cachint pa tous côtés pou trouver du minger, Toudis au long des qu’mins, jusqu’à user leus guimmes, Trinnint aussi toudis pou leus fius in dinger. Et tindis qu’pou l’Victoire in fait sonner les cleuques, Infin, les prisonniers vont r’v’nir à leu mason, Et tous les déportés et l’maquis qu’in bisteuque, Et pi les c’tis qu’Vichy iaveut mis in prison. Allons les tiots infints imrassez bé vo père, C’est aveuc vos caress’s qu’iobliera l’dur passé ; Si, dins s’captivité, ia souvint dit j’espère, C’est qu’in pinsint à vous, i n’s’est jommais lassé. Çou qu’la guerre a détruit in devra bé l’erfaire I va folloir s’aidier et ravoir cair les gins, Assommer l’égoïsme et, tertoutt’ solidaires, Bé comprinn’ qu’el Devoir dreut passer d’vint l’argint. Insinne no verrons pou guérir nos misères No bâtirons du bo, et du bé et du vrai D’puis si longtimps qu’in dit qu’tous les hommes sont frères Si in qu’minçeut à l’iett’, ça no donn’reut la PAIX. Léonce Bajart |
PALETTES |
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Nos chemins ont un goût de brouillard, à leur front dansent de rides ou des surprises, des poissons bleus ou des aliens au sang d’étoiles fauves. Tu franchis un espace clair-obscur, ou des ombres anciennes te draguent, te frôlent. Alors pour ne pas mourir d’amours rouillés, tu choisis d’emprunter la voie d’une brume transpercée, où babille un soleil matinal, où s’activent des palettes inconnues, un Eldorado pour les hommes décidés à chercher. Chaque matin, tes premiers mots traversent l’empreinte multiple des disparus. Donne-leur des raisons de t’envahir de leurs beautés. Pluies neuves |
Saut dans le vide |
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Il glissait bien à plat en recherche de vitesse. La croûte verglacée gémissait sous son poids. Et le soleil printanier procurait l’ivresse Qu’il estimait propice au plus grand des exploits. Les genoux fléchis dans la courbe du tremplin Il redressa le buste tel un toréador Et comme le fit Icare au tragique destin En plongeant dans l’azur, quitta le mirador Planant, les deux bras bien collés le long du corps Spatules dressées ainsi que les ergots d’un coq Soudain persuadé qu’il battrait le record Et qu’il ne lui restait plus qu’à porter l’estoc. Les semelles de ses skis touchèrent la neige damée Il plia la jambe droite, la gauche se déroba Il partit de travers en un roulé-boulé Et dans les barrières perdit son combat. Ainsi on agit bien stupidement parfois Et prenant nos désirs pour des réalités. On se croit triomphant mais on reste pantois Lorsqu’on s’ met le doigt dans l’œil avec témérité. Jean CASTEL (Cambrai) |
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Dis
moi Au revoir |
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Caresse moi la hanche Glisse tes doigts sur mon corps Approche toi et je me penche J'en demande encore Allume toi une cigarette Verse toi un whisky Rejoins moi sous la couette J'en ai tellement envie Ton corps sur le mien Je te veux toi Ma langue au creux de ta main Entre en moi Notre ébat amoureux Danse de nos corps Accélère, de mieux en mieux J'en redemande encore Nous y passerons la nuit A vibrer ensemble Nichés dans ce lit J'en ai la peau qui tremble C'est ma façon de te dire au revoir Car je te quitte Je ne veux plus te revoir Maintenant nous sommes quittes ! Julien BURY |
EN CE TEMPS-LA |
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Oh ! Bourgeois du seizième arrondissement, Vous qui êtes nés riches, opulents, Vous qui croyez être élus des Dieux, Votre fortune vient souvent de vos parents, De l’héritage de vos aïeux… La tête droite, l’allure altière, Dans vos habits de lumière, Si rayonnants, si élégants, si beaux, Avec dédain, vous toisez ce banc de misère, Ce va-nu-pieds vêtu de guenilles en lambeaux, Fixant devant lui, je ne sais qui, De ce regard sans vie. Ce moins que rien, ce paria, Qu’ose-t-il faire là ? Sait-il que ces luxueux quartiers de Paris, Depuis toujours vous sont acquis ? Qu’il aille au diable, ce mécréant ! Vous qui souvent, êtes catholiques pratiquants, Bonne conscience vous avez, Puisqu’à la messe vous allez, Satisfaits de votre générosité, Puisque de beaux billets Dans la corbeille vous mettez. Oh ! Messieurs les nantis, Vous dont la vie, c’est pain bénit. Soyez un peu miséricordieux, Ne mettez plus ces miséreux, Ces êtres meurtris par la solitude, Accablés par la vie et ses turpitudes, Ces hommes anéantis, plus bas que terre ! Car ces gens-là savent ce qu’est l’enfer ! Vous les méprisants, les dédaigneux, Vous les seigneurs de l’indifférence, Vous qui aimez étaler votre suffisance, Vous qui croyez aller sans jugement aux cieux, Vous serez peut-être leurs valets devant Dieu ! Bernard Simon |
Jardin secret (Souvenirs) |
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Bonsoir, petit bout d’espoir, refrain de ma pensée, te voilà à mon rendez-vous de solitude, fuyante et muette, icône éclairée de l’aura de l’arc-en-ciel d’une fin d’orage, bonsoir Promeneuse dans mon esprit. Te voilà aventurière pour une balade dans le jardin secret de mon cœur à compter les pétales de rose. Elles pleurent pour parfumer tes pas et toutes les jonquilles se penchent pour caresser tes jambes, peindre ta peau d’or de leur pistil, dessiner leurs empreintes et t’emporter vers un destin de prairie. Les iris encagoulés applaudissent cette visite et leurs cimes pointues se tendent pour admirer cette charmante. Quelques-uns, précoces, s’ouvrent déjà et la rosée perle encore à leurs lèvres bleues entrouvertes. Jaloux, les forsythias s’éclatent en bougeons pour tes regards pleins de douceur. Un pommier du Japon emprisonne de bonheur tes hanches et ses petites fleurs rouges s’écarlatent de tant de hardiesse ; il a limé ses petites épines et frissonne de toutes ses feuilles, du plaisir de te retenir. Maître lilas double la mise, il explose en blanc, en mauve, il s’expose, t’étourdit des vapeurs de ses grappes lourdes *emparfumées, il expose ta beauté dans le feu d’artifice des couleurs du temps joli, il te tend ses branches, attend ton gentil nez pour s’exhaler tout en beauté, s’exhiber tout en odeur, s’extasier de rencontrer cette fée aux senteurs de jeune printemps. Et puis, au fond du jardin, l’abricotier attrape tes cheveux, les peigne de ses jeunes fleurs, les parfume, les tisse, les garde comme autant de guirlandes pour un Noël de jardin, quand les enfants courent en rires entre les arbres, chavirent la balançoire, quand le Papy, d’une sieste d’ancien, se laisse endormir sous l’acacia dans sa pluie de fleurs de miel, quand la Mamy étend les grands draps qui claquent au vent d’espoir de beau temps dans une chanson d’antan et que ton pauvre serviteur a gravé dans sa mémoire ces moments d’un autre temps, qu’il les entretient, comme le massif d’œillets de poète d’alors, quand les fleurs criaient la beauté de leur parfum dans les couleurs encore si vives de ma mémoire. Si tu écartes les feuilles de cet abricotier si peu sauvage, en liberté, tu verras un petit nid *emplumé, gonflé de quelques œufs, d’une mésange si farouche que j’entends encore ses chansons apprises au diapason de notre bise, du rire du vent des montagnes et des collines de mon Pays que j’aime à dire… Tu t’es promenée dans un jardin que j’ai bien connu, où il faisait bon vivre et respirer la douceur de la terre après un bel orage, voire l’arrosage du soir quand les tomates gorgées de saveur s’habillent en rouge, t’interdisent de penser ailleurs qu’à ces moments magiques. Quand les haricots verts se tendent en tendresse pour la caresse du cueilleur, curieux de ses dessous de feuilles jalouses ou farouches. Les fraises, en bonbons sucrés, tapies sur un lit de paille, se prélassent aux rayons de notre soleil si timide, parfois caché par les grands nuages dévalant le ciel vers le midi ou escaladant la Moucherolle en cache-nez de demoiselle timide. Et puis les framboises apprivoisées, grappillées par les petits enfants quand le Papy est bien endormi… d’un œil… Toutes les hirondelles, comme autant de papillons, en noir et blanc, en course dans l’azur, découpent le temps dans des cris d’oiseaux libres, comme ces phrases qui crient de chagrin ce passé glorieux, ce passé éteint. Alors, si tu vas voir la Belle qui dort dans le bassin moussu, où se baignent et dansent nos poissons rouges, en te penchant, tu la réveilleras et elle te sourira mais si une larme s’anéantit dans l’onde, elle se cachera. Au loin, tinte une gentille clochette des alpages, notre Papy s’est animé d’une faim légitime, refermons la porte de mon jardin secret. Un souvenir pourrait s’échapper, m’oublier, laissons aux moineaux ce ciel de printemps, l’espace et le temps se confondent. J’entends encore chanter la balançoire, la tondeuse coiffer la pelouse sauvage, roucouler les tourterelles avec les tourtereaux et le silence de ce paradis perdu dans ces instants de pur bonheur si simple mais si fragile. J’espère que tu as aimé ma petite visite si peu guidée. Ici, la nuit, on voit courir les étoiles filantes, on a le droit de faire tous les vœux qu’on espère, on a le droit de reconnaître ceux qu’on aime, briller plus fort, dans un coin de ciel d’encre noire, on a le droit de frissonner de bonheur en faisant croire que c’est la fraîcheur de la nuit. Une lumière s’éteint, notre Papy s’est endormi. *Ne cherchez pas dans le dico… PASCAL |
A LA LUEUR D’UNE BOUGIE
ETEINTE |
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Suite du n°72 Bientôt, les jumeaux se retrouveraient seuls, sans personne, abandonnés. Considérés comme des adultes, ils devraient se débrouiller par eux-mêmes et bien que leur groupe de fidèles amis ne les laisseraient pour rien au monde, le frère et la sœur avaient parfaitement conscience qu’ils ne pourraient plus compter que sur l’autre pour avancer dans cette vie dont ils avaient été si longtemps préservés et protégés par leur tante. Cette dernière, allongée dans son lit, le corps dissimulé par un océan de draps aussi blancs que sa peau blafarde, observait sa nièce et son neveu d’un air soulagé. -Approchez,
mes petites étoiles, leur souffla-t-elle avec un signe pour les inviter à
s’asseoir au bord de son lit. Que vous êtes beaux, tous les deux. -Bonjour, tante Sihir, chuchota Lysaëlle comme si elle craignait de briser la fébrile quiétude qui les entourait. Comment tu te sens ? -Oh,
vous savez…Il y a des jours avec et des jours sans, sourit la sorcière. Ce
qui compte, c’est que tous les deux vous alliez bien. Les jumeaux échangèrent un regard empli de tristesse. Ils connaissaient assez leur tante pour savoir que la vieille femme détestait se montrer faible, notamment lorsqu’elle tombait malade, et qu’elle avait toujours eu à enjoliver la réalité pour ne pas inquiéter son neveu et sa nièce. Pourtant, les deux adolescents n’étaient pas aveugles. Il leur suffisait de l’observer avec attention pour voir qu’elle souffrait et puisait dans ses dernières ressources pour tenir le coup et faire face avec dignité. Ses cheveux couleur d’argent, autrefois brillants et étincelants de vitalité, étaient ternes et sombres, fanés. Son visage, creusé de fatigue, était cerné de poches violacées sous ses yeux éteints et ses traits étaient tirés de douleur. Alors qu’elle s'efforçait de leur sourire de ses lèvres desséchées et gercées pour les rassurer, Sihir fut prise d’une brusque toux qui la força à se redresser, une main pressée sur sa poitrine, crispée. Mae, dont l’inquiétude n’avait fait que s'accroître, caressa son dos avec douceur en tâchant de la calmer, tandis que Lysaëlle appelait un guérisseur depuis le couloir. Le jeune homme parla doucement à sa tante, tâchant de maîtriser le tremblement de sa voix, mais sa toux ne semblait pas le moins du monde perdre en intensité. Au contraire, elle ne faisait que redoubler et se renforçait. Au bout de longues minutes, la sorcière malade se laissa retomber contre ses oreillers avec un gémissement plaintif. Sa respiration était laborieuse, sifflante, et elle avait du mal à reprendre son souffle, toussant encore un peu. Quelques gouttes carmin étaient venues tacher ses lèvres et Mae les essuya délicatement pendant que sa jumelle apportait un verre d’eau claire à leur tante. Sihir but de petites gorgées timides avant de pousser un profond soupir las. Elle avait considérablement pâli depuis leur arrivée et sa vision était devenue trouble. Son cœur épuisé battait lentement, trop faiblement, et elle porta la main au collier qu’elle arborait comme une œuvre d’art autour du cou. Mae l’avait souvent vu sans jamais oser poser la question de ce dont il s’agissait exactement. Le collier en question était composé d’un fermoir en forme de cœur recouvert de nacre rose. Des entrelacs de coraux multicolores habillaient la pointe du cœur et étaient sertis d’une perle violette parfaite. Au dos du médaillon, une lune et un soleil noués l’un à l’autre étaient gravés. -Lysaëlle, approche, demanda la sorcière en
tapotant le bord du lit. Mes enfants, je dois vous parler, et je ne peux
le faire qu’à vous seuls… -Garde tes forces, tante Sihir, l’implora la jeune fille qui lançait des œillades inquiètes en direction de la porte, se retenant de courir chercher les guérisseurs. Tu dois te reposer… -J’ai tâché de vous protéger aussi longtemps que j’ai pu, déclara Sihir sans prêter attention aux protestations de sa nièce, mais elle m’a retrouvée et prise par surprise, et je veux vous révéler la vérité avant qu’il ne soit trop tard… -Elle
? s’étonna Mae sans comprendre. Qui ça, “elle” ? Tata ! _Prenez-le,
et écoutez son Chant, expliqua-t-elle en
décrochant son collier qu’elle déposa soigneusement dans la paume de son
neveu. J’avais pour mission de veiller sur vous jusqu’à ce que vous soyez
en âge de comprendre. Je vous ai toujours appelés mes petites étoiles, parce
que c’est ce que vous êtes. Matahari… Mahina… Vos parents sont en vie, avoua-t-elle en
plongeant son regard dans ceux, perplexes et légèrement effrayés, de ses
cadets. Retrouvez la lune et le soleil, écoutez le Chant, suivez la
prophétie… La dernière nuit d’automne approche… Vous devrez faire vite, mes
enfants… La bougie… Elle… Avant
qu’elle n’ait pu poursuivre ses explications, Sihir
fut prise d’une nouvelle et violente quinte de toux. Lysaëlle,
n’y tenant plus, s’enfuit à toutes jambes en appelant après les guérisseurs.
Mae, lui, était pétrifié sur place, les yeux fixés sur sa tante et ses doigts
serrés compulsivement autour du collier de cette dernière. Elle toussa
longuement avant de s’écrouler, une nouvelle fois, contre les oreillers, sa
poitrine se soulevant à peine. Sa sœur revint quelques instants plus tard,
accompagnée de deux guérisseurs habillés d’ample tenue couleur vert forêt et
ciselée de gravures en bronze. Le jeune homme, sous le choc, fut écarté du lit de la patiente et se retrouva blotti dans les bras de sa jumelle qui embrassa son front et caressa ses cornes pour l’apaiser. Il pleurait, mais il ne le réalisait même pas. Ses yeux vairons restaient obstinément fixés sur le corps de sa tante qui s’était soudainement immobilisée dans son lit, les yeux mi-clos, la tête penchée. Un poids lui tomba dans l’estomac et une boule de chagrin se forma dans sa gorge. Lysaëlle prit sur elle, en dépit de sa propre peine, et éloigna son frère de la chambre pour les conduire tous deux dans le jardin, à l'abri des regards, là où leur magie élémentaire prenait racine, en plein cœur de la nature. L’esprit du jeune homme tournait à plein régime, bien qu’il eût l’impression que ses pensées se soient pourtant figées subitement. Leur tante était-elle morte ? Venait-elle de rendre son dernier souffle ? Qu’avait-elle voulu dire ? Leurs parents étaient-ils réellement en vie ? Si telle était la vérité, pourquoi la leur cacher si longtemps ? Qu’en était-il de cette histoire de Chant qu’il fallait écouter ? Et cette prophétie ? Se sentant submergé par le flot de pensées et de sensations qui l’assaillaient de toute part sans lui laisser le moindre répit, le sorcier à la peau bleue s’écroula, à genoux sur le sol, et hurla de toutes ses forces pour faire taire la puissance bruyante du monde autour de lui. Dans son dos, sa sœur s’agenouilla à son tour et nicha son visage dans le cou de son jumeau pour pleurer en silence. Elle caressa ses courts cheveux châtain sombre pour l’aider à se calmer, mais elle savait que rien ne pourrait apaiser son cœur meurtri. Leur tante était partie, leur maman de cœur décédée. C’en était fini. Leur cœur était devenu lambeau, leur espoir éteint, leur âme rendue poussière. Il battait à tout rompre dans leur poitrine, au rythme des sanglots silencieux qui secouaient leurs épaules et des larmes torrentielles qui roulaient sur leurs joues. Mae avait l’impression que le sol s’était dérobé sous ses pieds. Il savait que sa sœur, comme lui, était en proie au chagrin, mais le sorcier avait toujours été le plus sensible des deux, et il avait l’impression de ne plus pouvoir se relever. Et pourtant, en dépit de sa carrure plus frêle, Lysaëlle le tirait vers le haut, littéralement. La jeune femme venait de passer ses bras autour du torse de son frère pour le soutenir et elle le guida loin du jardin, loin de la maison, loin de la mort, loin des souvenirs. Conscient que s’il ne suivait pas le mouvement de sa sœur, il ne représenterait rien d’autre qu’un poids mort à traîner, Mae força sur ses jambes et, sans chercher à savoir où ils se dirigeaient, se laissa entraîner par sa jumelle qui continuait de lui chuchoter des mots tendres à l’oreille tout en lui caressant les cheveux et les cornes pour l’apaiser. Peu à peu, le jardin laissa place aux rues pavées et enjouées de la cité. Le ciel était d’un bleu cristallin, sans nuage, et le soleil caressait le monde de ses rayons. Drôle de journée pour débuter un deuil, pensa amèrement la sorcière aux yeux vairons en conduisant son frère à travers les allées, parfois la vie possédait un étrange sens de l’humour. Personne ne semblait leur prêter attention, même si quelques-uns se retournaient sur leur passage en affichant un air attristé. Entre l’état de détresse avancé de Mae et leurs vêtements violets, il n’était pas difficile d’aboutir à la conclusion qu’ils venaient de vivre un décès. Lysaëlle secoua la tête, tâchant de ne pas s'apitoyer sur son propre sort, et prit la direction d’une ruelle étroite, un peu à l’écart du centre de la cité, qui déboucha sur une impasse. La jeune sorcière avançait avec assurance, bien que devant régulièrement ralentir pour continuer à soutenir son frère qui traînait les pieds. Elle les conduisit jusqu’à une petite chaumière en pierre couleur sable dont la façade était recouverte de lierre et elle toqua à la porte de bois en reprenant son souffle. Une seconde plus tard, la porte s’ouvrit et elle n’attendit pas une minute de plus pour entrer en saluant son hôte d’un “bonjour” étouffé. -Hum… Salut ? -J’ai déjà dit bonjour, Ima…,
souffla-elle en déposant son frère sur un siège dans la cuisine. J’ai
besoin de toi pour Mae… -Qu’est-ce
qu’il lui arrive ? Il est plus pâle qu’un camélia blanc du japon ! -Tante Sihir vient de mourir, il est sous le choc. Le jeune homme qui lui avait ouvert se nommait Imasu, Ima pour les intimes. Enfant du monde féerique, l’elfe était le plus vieux de leur bande d’amis, puisqu'étant âgé de vingt-quatre ans. Malgré tout, cela ne l’empêchait pas d’être le plus petit, du haut de son mètre soixante-cinq tout rond. Le plus vieux, certes, mais physiquement le jeune homme semblait immortel. De ses cheveux d’un rouge coquelicot sombre aux reflets prune tressés de plumes et de perles de bois, à sa peau blanche et laiteuse, en passant par ses yeux vert prairie qui semblaient scintiller, Imasu avait conservé l’air innocent d’un enfant, prisonnier d’une sagesse d’adulte millénaire. Sur ses bras nus, des tatouages en forme de lierre couraient le long de sa peau, semblable à ceux qui recouvraient sa maison. Lysaëlle remarqua qu’il portait une ample chemise de lin entrouverte sur ses clavicules, un corset de cuir brun et un pantalon mêlant les deux textures, ce dernier brodé de motifs naturels et colorés. Avisant ses pieds nus, la jeune femme se laissa à sourire : Imasu avait toujours été beau, même si son style ne correspondait à celui d’aucun autre.. A suivre Blue LYCENNE |
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LE TUNNEL DU TEMPS |
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SUITE DU 72 – HERTIA-MAY Et
bientôt, nous fûmes submergés par un flot d’ondes de la Terre 4921. La fusée
ralentit et l’on vit la planète se distinguer du vide : son atmosphère
bleutée comme celle de son satellite l’enveloppait d’un mystère peut-être résolu ! La Lune devait son enveloppe
colorée, sans doute au fait que son atmosphère avait été « terra
formée ». C’était bien la Terre qui brillait dans son manteau de brume. Starol montrait son émotion en revoyant son monde. Les Emeraudiens ressentaient cette double pulsion : par
la découverte de leur planète et par leur quête scientifique. Les
« 6238 » regardaient cette terre avec une lueur dans leur regard,
ils furent distraits un instant, en voyant cette image. Ils se détournèrent
ensuite pour aller se préparer. Une
chaloupe identique à la B-5, la Z-4, fut affrétée dans le sas. L’équipe qui
resterait à bord d’Emeraude V comptait Zéraz, Svan, Adsen, Adgi Cordoba, etc., plusieurs scientifiques et près de
deux cents patrouilleurs. Le restant fut partagé dans les trois
navettes : B-5, C-8 et Z-4. Les trois nefs survolèrent une grande ville
appelée Torocimont. Elle ressemblait à nos villes,
bien que ses rues fussent envahies de gens calmes, trop placides. Ils
avançaient comme des robots. Les toubibs en choisirent un comme cobaye. Un
cardiographe enregistra ses battements de cœur : son rythme étonnait par
sa fréquence lente. Le système musculaire semblait peu
actif. Pourtant, le décorum de cette cité semblait équilibré : les
quelques tours de béton se noyaient entre les maisons peu hautes en bois et
recouvertes de végétation. Des parcs harmonieux complétaient le tableau avec
les arbres multicolores à fleurs et à fruits géants. Un sommeil innommable
régnait sur cette contrée figée. Un film au ralenti semblait tourner dans ce
paysage. Dans C-8, les commentaires fusèrent : Mo : « Plutôt calme, ce
bled ! » Bloss
: --« Comme distractions, ils ne sont pas aidés ! » Blav
: --« La récupération des personnes non affectées est
primordiale ! » Scott : --« À Starol de Z-4, où sont les habitants sains ? » Starol
: --« À Emeraude, ils se sont réfugiés dans les Montagnes Bleues ». Dagjèr
: --« Filons-y vite ! » Les trois fusées accélérèrent vers ce
site. En survol au-dessus des dits sommets, ils furent aveuglés d’éclairs
verts et bleus. Certainement une manifestation des réfugiés ! Ils
descendirent. Des ravins abrupts s’ouvrirent avec des falaises criblées de
cavernes. Les éclairs provenaient de l’une d’entre elles. L’entrée assez
large permettait le passage des engins spatiaux. Cette anfractuosité servait
d’antichambre, des portes de métal vert garantissaient l’entrée de galeries
s’écartant dans plusieurs directions. Miroirs et autres procédés optiques
s’accumulaient dans un coin de la cavité. Les signaux lumineux provenaient
d’ici. Un sas s’ouvrit, découvrant aux visiteurs une obscurité glaciale.
L’important groupe s’y précipita en scaphandre, à la lumière de torches. Le
portail se refermant sur eux, ils continuèrent, n’ayant pas le choix. Un
cercle de lumière, fouillant les ombres, décela une porte identique à la
précédente, encadrée de projecteurs de lumière ultra-violette. Sensibles au
mouvement, ces appareils tracèrent des rayons, ouvrant la deuxième porte.
Quelques hommes les accueillirent, l’espoir luisait maintenant dans leurs
yeux ! « Enfin,
c’est vraiment un miracle que vous soyez parvenus jusqu’à nous ! » Scott
: --« Nous n’avons pas pu communiquer avec vous pendant le voyage, il a
fallu localiser votre planète. Ces gens-là viennent du futur, de l’an
6238 ». --« Nous
avons un téléporteur d’ondes, mais pas de
récepteur. Nous pourrons toujours communiquer avec votre fusée. Nous sommes à
un total de cinquante, mais pour prévenir toute intrusion ou maladie, nous
avons installé ces détecteurs UV et placé ces portes en foxtor,
métal opaque à tout microbe. Le virus traverse tous les autres métaux. Au
fait, je me présente : mon nom est Olz Pare.
Voici mes collaborateurs qui aidèrent à retrouver les autres réfugiés avec le
télé-onde : Bardz Foh,
Ripor Mandol, Dax Ivieu, Lopi Ridana
(une femme), Dino Sabello. » Scott
: --« Nous nous présenterons plus tard. Le vaccin est en cours
d’achèvement, nous avons survolé Torocimont :
les habitants marchent au ralenti, hallucinés. » Des
patrouilleurs se pointèrent avec des ballots de scaphandres, les
non-contaminés les enfilèrent. Toute une file de gens enfin optimistes sortit
de la caverne. Les navettes se remplirent de passagers et décolèrent. Les trois
appareils rentrèrent dans les sas d’Emeraude V. Starol
ressentit une piqûre au bras lorsqu’il retira son « enveloppe ». Dagjèr s’approcha de lui, fouilla dans la poche du
scaphandre, saisit un objet, le sortit et s’éclipsa rapidement. Starol regarda son bras, le sang était déjà sec. Quel
objet avait saisi Dagjèr ? Une ampoule !
Une ampoule de sang de Starol. Dagjèr
retrouva dans une salle de conférence Scott, Blav ,Svan,
Adsèn, Eva, Chantal et le reste de l’état-major.
Sur l’écran du microscope, les membres de cette réunion observèrent des
globules rouges qui nageaient autour des blancs. Du sang ordinaire, quoi ! Du
sang et des hommes automates. Un microbe ? Où ? Leur sang était tout à fait
classique ! Une simple histoire confuse où manquait le fameux virus !
Ce virus capable de traverser les portes, affectant les centres nerveux,
n’existait pas ! Greg admit qu’il s’était fait
« embobiner » comme ses autres compagnons ! Dagjèr :
» Ce n’est qu’un procédé d’hypnose très puissant et dire que l’on avait
conversé sur les sciences occultes et tout le tsoin-tsoin ! » Eva : --« Reconnaissons notre
erreur » Blav
: --« Il s’agit maintenant de corriger notre attitude et de détruire
notre ennemi. Il cherche, à l’évidence, à envahir la Terre de l’an
4921 ! » Le lendemain, le vaccin était prêt : du moins, on le
faisait croire. Les « 6238 » étaient partis en expédition à bord de
leur engin. Ils revinrent vers le soir. Ils étaient plus nombreux, c’était à
prévoir ! Ils pénétrèrent dans le sas. Une porte s’ouvrit, laissant
passage à Scott, Dagjèr, Bora, Greg, Chantal, Blav, Eva, Zéraz. Une deuxième
ouverture fît place à Mo, Bloss, Mardzog, Torew, Djo ,
Sam, Kraf, etc. D’un troisième couloir, surgirent Dzett, Svan, Adsèn. Peu à peu, toutes les entrées permirent
l’introduction d’hommes armés pointant leurs armes sur les
« 6238 ». Ces derniers reculèrent dans une autre pièce, qui se
bloqua derrière eux. La paroi de cette salle, transparente, permit aux Emeraudiens de suivre le déroulement des opérations. Dtzovt se tourna vers Scott : » Qu’est-ce qui vous
prend ? ». Starol en rajouta :
--« Quelle est donc cette manœuvre ? » Starol
regarda ceux qui l’avaient sauvé de la pandémie. C’est alors que Scott prit la parole
: --« Ces gens-là ne sont pas terriens ! » lança-t-il vers Starol. « Ils cherchent à envahir votre
planète, la nôtre en l’occurrence, ils ont hypnotisé vos compatriotes pour
leur faire admettre la présence d’un virus. Ils nous ont alors appelés pour
nous demander la réalisation d’un vaccin contre tous les microbes. Ce vaccin
vous aurait détruit, en combattant les colonies de bactéries de votre corps.
Votre peuple serait vite mort ». Il reprit sa respiration :
« Votre organisme contient des globules blancs donc vous connaissez les
microbes. Ce qui n’est pas le cas de vos envahisseurs. Il fallait donc se
débarrasser de ces micro-organismes pour y vivre ! ». Starol s’était affaissé dans son siège, bouleversé comme
ses cinquante compatriotes qui assistaient à cette révélation. Blav :
« Oui, Messieurs ! » s’adressa t’il aux
envahisseurs. « Vous avez trouvé en la Terre une planète habitable,
votre soleil devenant une supernova dans la constellation du Verseau,
condamnant votre planète Org. Vous auriez pu
demander de vous aider : nous aurions contribué à cette tâche … »
Uwe Von Fragten intervint pour quelques néophytes :
--« Une étoile devient une supernova quand elle manque d’hélium pour
tempérer la fusion de l’hydrogène. Nous aurions pu vous en fournir ou même
fabriquer un satellite artificiel pour patienter, le temps de déménager sur
un monde accueillant. Plutôt que cette solution, vous avez choisi une
alternative perdante. Vous avez voulu tout avoir et vous n’avez
rien... » Kelekio
: --« Toutes les fusées de vos compatriotes seront détruites par nos
soins ! Quel gâchis ! » Dagjèr
: --« Maintenant, vous allez disparaitre, nous sommes absolument désolés
mais il le faut ». Dagjèr appuya sur une
manette de la table de contrôle. Cinq portes s’ouvrirent dans la salle des
prisonniers, laissant passage à cinq robots de taille humaine, les parois se
refermèrent aussitôt. Les extra-terrestres se jetèrent sur les types d’acier,
de toutes leurs forces, espérant détruire leurs commandes. Ce fut une lutte
entre cinq hommes de métal et une centaine d’Orgs.
Les ennemis tombèrent, labourés par les griffes et les lasers des automates. Lacérimèk tombèrent ! Parfois, un Org regardait avec désespoir les terriens avant de
s’écrouler. La terre ne pardonnait pas à ses ennemis ! Godérinink
et Flodoradiz quittèrent le champ de bataille à
leur tour. Ils ne cherchaient plus à s’échapper, ils faisaient une muraille
de leurs corps à Dtzovt. Ce fut sans espoir. Le
massacre stoppa, la porte de séparation s’ouvrit. Dtzovt,
suivi de Ludax, Saradux
et d’une quarantaine d’autres entra. Le local, vidé de leur présence,
bascula. Les cinq robots et les victimes tombèrent dans le vide. Zéraz, aidé d’un télé-onde, parvint à sortir les terriens
4921 de leur état d’hypnose. Starol et ses
cinquante compagnons redescendirent dans leur monde, remerciant leurs
sauveurs. Emeraude V s’éloigna de Terre 4921, détectant les fusées ennemies qui pouvaient les
menacer. Scott : --« Dtzovt,
nous vous laissons une dernière chance, vous allez envoyer un message à vos
fusées. Dites-leur que s’ils renoncent à la paix avec nous, nous les
détruirons ! » Dtzovt
transmit un ordre à un de ses hommes : Menisox.
Ce dernier appela Dalporax, commandant d’une
fusée. Le commandant les mit en
contact avec le professeur Bardnzol , sans doute le chef des Orgs. Bardnzol
: --« Vous avez échoué dans votre mission, Dtzovt.
Vous mourrez avec vos hôtes ! » Ludax
: --« Professeur, les Terriens vous envoient un message de paix. Si vous
le refusez, ils vous détruiront ! » Dtzovt
: --« Nous sommes bien d’accord, il faut accepter la paix avec eux. Ils
nous aideront à survivre ». Ménisox
: --« Nous ne vous considérons plus comme notre leader, si vous réfutez
un accord ». Bardnzol
: --« Nous sommes des millions de fois plus nombreux, nous les
vaincrons ! » Crusux,
commandant d’une fusée : --« Nous acceptons votre offre, les gens que je
transporte préfèrent la paix. Que faut-il faire ? » Scott : --« Posez-vous sur la
Lune, ce sera votre nouvelle patrie ! » à suivre HERTIA-MAY |
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