SOMMAIRE DE LA CAUDRIOLE N° 11
Juillet-Août-Septembre 2004
Illustration
BD page 2
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Patrick
MERIC
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Un écrivain "de voisinage" page 3
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Denise LEPRÊTRE
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JEUNES |
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L'amour page 4
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Natacha LEROY |
Je suis une fleur page 4
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Florence L |
Le
monde est là page 5 |
6ème
S.E.G.P.A Collège Renaud BARRAULT
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Papier magique page 6 |
LUCIOLLE *
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Petits-noms page 6 |
Floriane KUROWIAK |
Amor mio page 7 |
Christelle
LESOURD |
Chien
et chatte page 7 |
Fanny
CANONNE |
Un
petit clin d'œil page 8 |
Guislaine
LAURENT |
HUMOUR |
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Une histoire de barbecue page 9 |
Daniel
JACQUEMIN |
Patois d'Escaudoeuvres … page 10 Blagues
dins l’coin page 10 |
Charles
LERICHE Daniel
CARLIER |
MOMINT D’ACTUALITE page 11 HUMEUR PATOISANTE
page 11 L’terri
d’mes dix ans page 12 |
Jean-Pierre
LEFEBVRE Jacques
HUET |
ADULTES |
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Les caprices du coeur page 13 |
Geneviève
BAILLY |
Etre poète ou pas ? page 14 |
Auteur
inconnu |
Moi le chien page 15 |
Jeanne
FOURMAUX |
Sonnet à la lune page
16 |
Jean-François
SAUTIERE * |
Extraits de "Eclats d'âme" page 17 |
Thérèse
LEROY |
L'âge page 17 |
Un vieux
jeune homme |
Hommage page 18 |
Claude
BOISSE |
Dernière cuite page
19 |
HERTIA MAY |
Açvine page
19 |
SAINT-HESBAYE
* |
NOUVELLES |
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Le gloutoscope page 20-21 Le chaudron page 22-23 Saphir le Moustachu page 24-25-26 Le clou de la soirée page 27-28-29 Le Puits page 30-31 |
Marie-Josée
WANESSE Paule
LEFEBVRE GRASJACQS Denise
DUONG Jean-François
SAUTIERE |
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* Retrouvez
l’auteur dans la revue littéraire. |
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UN ECRIVAIN « DE
VOISINAGE »… |
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L’AMOUR, |
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Que représente ce
mot ? Amour = Bonheur
quand on le ressent dans le cœur Amour = Souffrance
quand on le perd Amour = Tendresse
et délicatesse Amour est
probablement le mot le plus beau de la langue française C’est la seule
chose valable dans la vie quand on le ressent au plus profond de son âme C’est somptueux Bonheur, amour et
tendresse voilà ce que l’on désire tous dans notre vie. Mais hélas
certaines personnes le ressentent, d’autres pas. Natacha.L 18 ans
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JE
SUIS UNE FLEUR |
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Je suis une fleur et toi un soleil, Quand tu es là mon cœur s’ouvre Mais quand tu n’es pas là, Je suis comme une pauvre fleur fanée. Quand je te vois Mon cœur se met A battre fort, Et je ressens la joie De vivre à nouveau. Le temps passe Mais tes souvenirs Restent à jamais Dans ma mémoire. Seuls les souvenirs De nos cœurs Pourraient nous unir. Même par 2000 façons Je ne pourrai jamais Oublier ton nom. Florence.. L 19ans |
LE
MONDE EST LA |
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6éme SEGPA Collège Renaud – Barrault AVESNELLES |
Petits-Noms |
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AMOR-MIO |
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Chien et chatte |
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Il était une fois
un chien et une chatte qui s’aimaient beaucoup. Le chien
s’appelait Jacques et la chatte s’appelait Minou. Et un jour Minou quitta Jacques. Minou rencontra
un autre chien qui s’appelait Grégory. Grégory dit à
Minou qu’il aime une autre chatte. Et la chatte
s’appelle Marie. Mais Marie a
rencontré un autre chien qui s’appelait Joffrey. Et Grégory a été voir Marie et l'a
vue avec un autre chien. Marie lui a
présenté Joffrey et alors Grégory est parti dans sa chambre
pour faire ses bagages. Fanny Canonne 8 ans |
Un petit clin d’œil… |
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Un petit clin
d’œil, Juste un petit
clin d’œil, Comme ça, en
passant, Lorsque tu n’es
pas content. Un petit clin
d’œil d’amour, Un petit clin
d’œil toujours. Je grimpe sur tes
genoux, Et hop ! On
fait les fous… Un petit clin
d’œil, Juste un petit
clin d’œil, Comme ça en
jouant… Ca y est ! Tu
souris, Et c’est
reparti ! Je te retrouve
enfin Et on repart, main
dans la main ! Mon petit papa à
moi Ce petit clin
d’œil là N’était rien que
pour toi Papa je
t’aime ! Guislaine Laurent Ecole SAINT - MICHEL
CAUDRY |
UNE HISTOIRE DE
BARBECUE |
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Le
barbecue est content, on le sort. Puis
on sort l’autre barbecue. Le
premier est rond, son voisin est allongé. L’autre,
on va lui donner à manger du charbon de bois. Et
toi ? Moi,
on me met rien que du bois. L’allumette,
elle dit : « Je vais m’éclater en allumant les deux
barbecues. » Le
charbon de bois dit au morceau de bois : « On va rougir. » Les
deux grilles disent : « On va nous salir, on sentira mauvais !
La saucisse et la merguez et les côtelettes pisseront sur nous. Car elles
s’en foutent : elles vont se faire bronzer ! » La
saucisse dit à la côtelette : « Toi, tu vas te faire
bronzer ! Tu as de la chance car
on va te mettre de l’huile et des fines herbes. » La
saucisse crie : « Et moi, je me fais bronzer mais je n’ai pas de
chance : on me pique de tous les côtés. Et j’ai mal ! » La
merguez dit : « Moi, on m’aime ! On me fait bien bronzer. On
ne me pique pas, on m’aime bien cuite. Mais parfois je pique. » L’eau
dit : « Je n’ai pas de chance : c’est tous les jours comme ça.
Moi qui ai tous les déchets, je me vengerai. Car j’ai des copains : la
bière, le vin rouge et le rosé. » Les
copains répondent : « Tout ça va remonter ! » Mais
le pain pourra défendre la saucisse, la côtelette et la merguez. Car
l’harmonie du barbecue, c’est de bien manger équilibré et de bien boire, car
ça sera la réussite du barbecue. La
fin : Les
deux barbecues disent : « A plus tard ! » Car
dès la fin du repas, les deux barbecues vont dormir jusqu’au prochain repas. Daniel JACQUEMIN Atelier d’écriture de
Thierry Maricourt LE CATEAU |
PATOIS D’ESCAUDOEUVRES |
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LES RADARS ET L’ Z’AMINNES |
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Alors à çou qui paraît l’ z’aminnes pou excès de
vitesse quind in est pris pas un radar al vont ête d’deux sortes. Si te n’
dépasse pos d’ trop l’ vitesse autorisée t’aras quarinte-chonque euros
d’aminne, si t’as trop appoîé su l’ chimpignan, là, t’aras dreut à
quatre-vingt-dix euros suns compter les points d’ moins su tin permis. C’est
sûr qu’ bocop d’ gins y n’éteutent pos contints mais j’ me d’minne si çà ara
bocop d’effet. In
tous les cas in peut constater tous les jours qu’y a d’ pusse in pusse ed gins
qui roul’tent pus pépère. Cà n’impêche pos certains arringés de l’ caf’tière
d’ continuer à s’ prinne pou Fangio. Et bé’ sûr, yeusses, y n’ sont jomais
flashés ! L’eute jour j’éteus à pied tout près d’un
feu rouche. Fernand y’ arrive aveuc s’ vielle deu-deuche toute rafistolée.
Paterlouffe : y passe à l’oringe. Y’ aveut justemint deux gendarmes à 10
mètres ed là. « Monsieur
vos êtes passé à l’orange ! » qui dit l’pus gradé à Fernand.
« J’ vas vos espliquer, qui répond Fernand, j’ai continué à
rouler à l’oringe parce que si j’ frinne trop fort, aveuc mes pneus usés tout
lisses, j’ poreux créer un accidint ! ». L’ gindarme, pindint inne bonne minute y
n’ d’est d’meuré baba. Après les aminnes all z’ont quéhu comme à
Gravelotte ! L’humeur
de Jean-Pierre LEFEBVRE |
LES CAPRICES DU CŒUR |
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Quand un divin regard, en caressant notre âme, Passe en toute innocence endormir la rancœur, Bien vite la révolte et les chagrins de femme, Viennent fondre au soleil, d’un charme
avant-coureur. En tombant amoureux comme on tombe malade, Nous vivons sous le joug d’une douce obsession. Dans un cœur affligé d’une étrange chamade, Soudain c’est le prélude à l’épique passion. L’été brille en hiver sous le feu d’un sourire, Et le désir s’entraîne à l’épreuve du temps ; Mais quand, de l’un par l’autre on se laisse
séduire, Il est vain d’esquiver le retour du printemps ! Geneviève
Bailly |
Etre poète ou pas ? |
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Y a-t-il un poète qui tout au
début, n’ait cru être celui du siècle ? Au fil des années cent indices
lui prouvent qu’il ne sera pas ce poète ; il se croyait unique jusqu’au jour
où il est entré dans le jardin de roses du Petit prince et où il en a vu des
milliers comme lui : les couronnés, les soleils de la poésie, les
incontournables et tous les échelons entre les grands et les
minuscules ; ceux dont les noms se clament, se répètent, deviennent
lancinants, et la cohorte des sans noms. Il y en a tant que tout se
brouille, qu’il ne sait plus où se placer. Croyez vous qu’il en soit plus
sage ? Pensez-vous qu’il perde tout espoir de recevoir le prix
Nobel ? La comparaison est changeante : un jour à son détriment, le
suivant en sa faveur. La tête lui tourne ? Il n’en voit que plus
d’étoiles. C’est la seule utopie. Car, pour le reste, personne n’est plus
réaliste que lui : n’aperçoit-il pas la vérité là où les autres se
contentent de l’apparence ? Quand il dit que sous le pétale, derrière
l’objet, au fond du cœur, il y a bien autre chose, le monde ne le croît pas,
le taxe de doux rêveur, ce monde qui est prêt à donner vie et pouvoir aux
machines. Du jardin de la poésie, il n’a pas
pu ressortir. Et là, sans doute, est la juste question : non « être
poète ou pas » mais « être ou ne pas être en poésie » ?
et la réponse est sans ambiguïté : celui qui, après sa désillusion, est
resté dans le jardin, celui qui n’a pas fui devant le nombre et la beauté des
autres roses, celui-là, personne ni rien ne pourra l’en chasser, celui-là est
un vrai poète. (Auteur inconnu) |
MOI, LE CHIEN |
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Moi qui protège ta maison, Qui te donne toute mon
affection. Qui te défend contre tous les
dangers, Montrant les dents, le poil
hérissé. Qui te sauve de la noyade, Des catastrophes, des
avalanches, des flammes. Qui détecte la drogue, les
bombes, Dans les gares, les avions. Qui est le compagnon du
troisième age, Des enfants, des aveugles, des
malades. Qui parfois est la victime, De tes humours, de tes ennuis. Qui trop souvent abandonné, Fais des kilomètres pour te
retrouver. Moi, le chien, Je ne demande en retour, Qu’un peu de tendresse et
d’amour. Fidèle, je le serai toujours, Car je t’aime, c’est tout. Jeanne FOURMAUX |
Sonnet à la LUNE. |
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J’aimerais la lune rousse aux
chemins de traverse, Seule à rester fidèle aux cœurs
adolescents Dont nous avons connu, instants
érubescents, Le bonheur, siroté sans nulle
controverse ! J’aimerais la lune d’or,
faucille à la renverse De nos grands champs de blés à
peine efflorescents, Rêves de jour laissés à la nuit
de nos sens Mûs des chaudes senteurs que
l’été seul déverse. J’aimerais la lune absente aux
soirs capuchonnés, Celle que les enfants font avec
un gros nez, Celle qui fait miauler les chats
avec justesse. Si j’en parle au passé, n’en
soyez pas déçus : Toujours je l’aime autant, mais
j’ai quelque tristesse En songeant que depuis, on a
marché dessus. Jean François SAUTIERE CAUDRY |
ECLATS D’AME |
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Les bêtes font moins d’histoires
que les hommes pour mourir. Les bêtes souffrent en silence et
meurent sans jeter un cri (et leur mort est gratuite). Le seul prix de leur mort sont les
fleurs de leurs amis. Un homme est mort ! Ses amis, en plus de leur
souffrance, doivent payer un 2ème prix : l’argent. Tu ne verras pas les larmes de mes
yeux Car je les cacherai dans
l’obscurité complice de la nuit. Tu ne verras pas les larmes de mon
cœur Car tes yeux sont aveugles. Seuls mes amis les plus simples
savent. Petite fille perdue dans le
brouillard de la vie, Jamais tu ne connaîtras la paix. Personne ne viendra te consoler et
essuyer tes pleurs Car nul ne sait les mots. J’ai dans la tête un grand chant
immensément triste Qui s’amplifie à mesure que tombe
la nuit, Et comme un cri étouffé, ne
parvient à s’exprimer. « Poète, reprends ta plume et
écris pour moi ce chant là ! » Thérèse LEROY Extrait de « Eclats d’âme » 29/08/72 |
L’AGE |
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On arrive, on est en bas âge L’âge tendre… le premier âge Et le temps de quelques saisons, On atteint l’âge de raison. Et puis voici la fleur de l’âge… A vingt-cinq ans, c’est le bel âge Et bientôt la force de l’âge. On se réveille et brusquement, Sans savoir pourquoi ni comment, Soudain, on est entre deux âges, Et l’on devient d’un certain âge. En observant les jeunes gens, On comprend qu’on porte son âge… Et voici le déclin de l’âge. On dit « quand vous aurez mon âge » Et puis rien n’est plus de notre âge. Et c’est ainsi que, d’âge en âge, En portant son petit bagage, Avec le cœur un peu meurtri, Et sans avoir très bien compris, On atteint la fin du voyage. UN VIEUX JEUNE HOMME |
HOMMAGE |
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« CEUX QUI
REVIENNENT » « CEUX QUI NE
REVIENNENT PAS » SUR CES TOMBES,
MESSIEURS, OU PASSE AUJOURD’HUI COMME UN FRISSON DE
GLOIRE, RECEVONS LES LECONS QU’ELLES NOUS DONNENT. SOYONS UNIS DANS LA VIE COMME
CEUX – LA, L’ONT ETE DANS LA MORT. OUBLIONS ! NOS QUERELLES ANCIENNES ET NOS DIVISIONS
STUPIDES. ET SUR CETTE TERRE
ROUGIE DE NOTRE SANG, OU L’ON ENTEND « COMME UN CRISTAL
PAR UN ECHO DE BRONZE ! » COMME UN ACCORD DE HARPE « APRES DES AIRS
GUERRIERS ! » OU L’ON VOIT « COMME UN LYS QUI
SANS BRUIT TOMBE SUR DES
LAURIERS ! » « COMME REGNERA LA
PAIX QUE DIEU DONNE AUX
PEUPLES ELUS » QUI REND LES VICTOIRES
FECONDES ET QUI REALISERA DANS LA
JUSTICE ET DANS LA LIBERTE LES DROITS
IMPRESCRIPTIBLES DE LA CIVILISATION. CLAUDE BOISSE |
DERNIERE
CUITE |
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Tanguant seul ballotté par le ressac d’ivresse Il avalait goulu l’air chaud par son gosier. Le litron de vin frais, dans le panier d’osier L’attendait dans le puits, retenu par la tresse. Le héros aviné, assoiffé de pinard Tira sur le cordon, qui se défit du kil Coulant à pic au fond. Resterait-il tranquille Laissant son sauvignon aux poissons et
canards ? Il s’en fut dans le trou, ceint de lin, sans élan. Aucun devin ne lit dans la lie de vin blanc : L’assistant de Bacchus, poursuivant son goulot, Perdit la vie en trinquant avec les têtards. Faut mieux tenir le flacon pour vivre plus
tard ; Tel ivrogne mourut, non pas saoul, mais sous l’eau. HERTIA – MAY |
« LE GLOUTOSCOPE » |
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Plus que trois
mois et enfin les vacances ! Je me vois déjà en short et tee-shirt, à l’aise
dans mon corps et mon esprit : MINCE. Le vendeur m’a
proposé cet appareil, à un prix défiant toute concurrence, enfin presque…. Il suffit de
monter le système dans la cuisine, avec caméras à installer dans le salon, la
salle à manger, la salle de bain, bref toutes les pièces de la maison ! Livré avec la
photo d’une pin-up à coller sur la porte du réfrigérateur, une ceinture avec
électrodes à porter dès qu’on a cinq minutes, une crème amincissante, une
crème raffermissante, des gélules de vitamines E, les recettes diététiques,
me voici parée pour le tournant de ma vie, je vais enfin entrer dans le
maillot de bain de ma fille de 14 ans et pouvoir assurer auprès de mon mari. SUPER ! Au départ,
c’est difficile, dès que le creux à l’estomac s’installe, on reçoit une
décharge électrique si on touche au saucisson, ça fait drôle, on décolle du
sol d’au moins dix centimètres ! Application
rigoureuse de la crème sur les cuisses, le ventre : pas de problème et
en plus ça sent bon : jusqu’à ce jour, je n’ai pas vu de différence, si
ce n’est que mon corps est devenu doux comme de la soie (qu’on aimerait
caresser !). Chaque jour,
après avoir inséré dans l’ordinateur du « gloutoscope » mon poids
et mes mensurations : séance d’enguelades diverses, parce qu’il parle
cet imbécile !!!! pas assez de sport, trop de charcuteries, trop de
tout, pas assez de rien…. Ce n’est pas de
ma faute à moi, si hier des amis qu’on avait pas vus depuis 6 mois nous ont
rendu visite ! J’ai bien prévu
du jus de tomate pour l’apéritif, mais comment résister quand on ouvre la
bouteille de champagne ???? J’attache ma
ceinture à électrodes et comme dans la pub, je fais le ménage en même temps,
et comme je vieillis, en trois quarts d’heure, me voici épuisée et de plus
torturée car les électrodes laissent de vilaines marques sur ma peau. Boire, il faut
boire : de l’eau bien sûr, je ne fais que cela, en ajoutant dans mon
verre le remède miracle qui m’a été vendu avec le reste, pour éliminer. Là aussi, tout
va bien, j’élimine. Si bien que j’évite de me déplacer à plus de trois
kilomètres de chez moi, de peur de ne pas trouver de toilettes à l’endroit où
je suis ! Quant aux
recettes adaptées, si vous le voulez, je peux vous faire goûter les galettes
d’Amazonie fabriquées à partir de bananes vertes, relevées d’épices (jamais
entendu parler !), je peux essayer de vous les faire avaler avec une
insipide tranche de poulet de 50 grammes cuite à la vapeur !!!! Et puis zut,
zut, et rezut : et je te vois, je te surveille, et je te culpabilise,
zut et encore zut, j’ai demandé au vendeur de venir rechercher son
« gloutoscope », mais ma lettre est devenue « n’habite pas
l’adresse indiquée ». Je ne peux
toujours pas entrer dans le maillot de bain de ma fille et j’ai comme
l’impression que dans l’histoire il y a «un pigeon». Je n’épilogue pas, mais
suis sûre que vous devez le penser…. Bonnes vacances… P.S. A propos,
mon mari désirant me tenir compagnie dans cette épreuve a perdu 3 kilos et moi,
avec un recul, je pense que le « gloutoscope » était simplement ma
conscience qu’un bon commercial m’avait vendue……… Marie
Josée Wanesse 2002 |
LE CHAUDRON |
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En fonte, peint en noir, il n’était en aucun
cas destiné aux divagations maléfiques des sorcières, pas plus qu’aux
créations plus subtiles des philtres d’amour. Mais nous y reviendrons. Vers
les années 70, alors que la Provence battait son plein de touristes comme
d’habitude, il nous prit l’envie de nous installer… dans le Gard. Le prix des
mas n’était pas le même, mais le même soleil embrasait les mêmes lavandes.
Notre home fut baptisé « Le Mas du Maïeur ». Traduire au gré de
chacun « meilleur » ou « Marie ». Il
apparut très vite qu’il fallait corser l’habitacle en y apportant les objets
adéquats aux lieux, à savoir une auge de pierre, un évier de pierre, un
bénitier de pierre, et, toujours de pierre, un rouleau d’agriculteur dont
l’usage m’est encore inconnu et qui joue toujours son petit rôle de menhir au
bas de mon escalier… de pierre ! Et
la boîte aux lettres ? Ah non ! Pas une de ces infâmes boîtes de
fer réglementaires ! Nous bravâmes l’Administration des PTT qui n’était
pas encore le monstre jaune agressif d’aujourd’hui. Et
le chaudron fut ! Il y a dans chacun
de nous un inventeur qui s’ignore et que la nécessité aide à naître.
Il fallait que le courrier
du chaudron fût protégé de la pluie, au moins pendant quelques heures. Or,
comment l’eau se comportait-elle avec le couvercle bien ajusté ? Et
bien, elle se glissait fluidement dans l’interstice très mince,-la fermeture
ne pouvant être étanche-, et descendait le long de la paroi du ventre creux
de l’objet pour devenir la petite flaque qui tapisserait le fond… sous le
courrier. D’où la nécessité d’isoler le dit courrier, mais de façon à
ce que le tout n’effleure pas l’eau et remonte au fur et à mesure. C’est là que le génie vint à s’exprimer ! Une première plaque en polystyrène légère et poreuse
surnagea, mouillée dessous et sèche dessus, une deuxième plaque plus fine, plus
légère, doubla la première, sèche sur les deux faces celle-ci, et le
courrier, léger lui aussi, coiffa le tout sans le moindre dégât. On a breveté des gens pour moins que cela, voyez
Lépine ! Pendant trente ans le chaudron parada sur
sa pierre, aussi, et épata des générations de facteurs. D’aucuns menaçaient
bien de ne plus utiliser l’appareil pour cause de non-conformité. Mais le
courrier passait. Un
jour pourtant la menace se précisa. Le préposé, un petit jeunot, ne fut pas
sensible au charme du chaudron. C’était un gars des villes… Il fallut en
passer par là. La boîte serait réglementaire ou ne serait pas ! On fit toutefois des concessions de
part et d’autre. On creuserait le mur de pierre qui jouxte le portail et dont
l’épaisseur avoisinait les cinquante centimètres, et l’infâme boîte de fer y
serait logée discrètement, avec deux entrées, l’une côté rue, pour le
facteur, l’autre côté cour pour les occupants. La pierre l’emportait donc
définitivement sur le métal. La boîte, en retrait des deux côtés, était
presque à l’abri du regard des puristes que nous étions. Oui
mais… car il y avait un mais, une victime, le chaudron ! L’engin n’avait nullement démérité,
même s’il en était préretraité ! Alors il fut décidé que nous
aurions le respect des choses qui ont servi sans défaillance, et qui n’ont
pas encore cessé d’être belles. On
jucha le chaudron sur un tumulus, à proximité de la « boîte », et
il se prit à rêver : « Et si un jour le facteur perdait sa clé ?
» … Et
tout bas, le bidon rond se bidonna… Paule LEFEBVRE |
SAPHIR LE MOUSTACHU |
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On pourrait croire qu’il s’agit d’une
pierre précieuse bleue, variété transparente de corindon, non, ce joyau est
de couleur blanche ; enfin, presque. Lorsqu’il se roule dans l’herbe, la
neige ou la boue, selon les saisons, le blanc prend des nuages de gris, au
grand désespoir de ses maîtres. Pas de quoi s’affoler pourtant,
« Stachu », autre surnom pour désigner le fauve, est auto
nettoyant ; cette appellation tonique lui colle à la peau aussi bien que
tous les revêtements de sol sur lesquels il exerce ses talents de cascadeur.
Alors pas de problème : la couverture posée sur le canapé remplacera
avantageusement la serviette de bain. Inutile d’envisager la douche, il
déteste ça : au sortir de l’eau, il s’ébroue pis que
« Beethoven » sans toutefois boxer dans la même catégorie, entre un
Saint Bernard et un West Highlands White Terrier, il n’y a pas photo !
Quoique sur le terrain des facéties et extravagances en tous genres, il soit
largement compétitif. Si on ose traduire ce nom de race, on obtient quelque
chose du style « terrier blanc des collines de l’Ouest ». L’homme
de la rue n’y trouvera pas son comptant. Par contre si vous lui annoncez
« Westi », il risque de résoudre l’énigme, une chance sur deux
dirons nous, et si, en dernier ressort, après deux essais infructueux vous
susurrez « César », vous aurez l’occasion de constater que la
publicité a déclenché dans l’esprit des gens l’amalgame entre une race de
chien et une variété de croquettes pour le dit animal. Lorsque
Ulysse partit dans sa dix-septième année rejoindre le paradis des chiens, les
époux Gracjacqs s’étaient juré de ne plus jamais accueillir la gent canine
chez eux tant leur peine d’avoir perdu leur caniche croisé était trop forte.
Une aussi longue existence riche en souvenirs pétillants génère une grande
complicité entre l’animal et ses maîtres, rendant les derniers mois de sa vie
très difficiles à supporter pour ceux
qui le chérissent et l’entourent. Très dur de promener un moribond d’une allure trotte-menu
sous l’œil inquisiteur du voisinage ne comprenant pas toujours qu’on
s’acharne à le garder sur cette terre alors que la science peut abréger ses
souffrances, insoutenable de satisfaire à ce rite au ralenti alors que
seulement un an ou deux auparavant la balade était pratiquement réalisée au
pas de course. Nécessaire voire même indispensable de remettre à sa place
ceux dont la délicatesse n’est pas une seconde nature : - Il est de plus en plus mal, vous ne devriez plus le
promener, il ne doit plus en avoir pour longtemps… -
Vous non plus, moi non
plus, qui sait, ce n’est qu’une question de patience… -
Il fallut pourtant se résoudre, la mort dans l’âme, le
trente Décembre 2000, à faire euthanasier le fidèle compagnon, celui qui
apporta tellement à la famille par sa gaîté, son entrain communicatif, sa bonne
humeur, sa loyauté à toute épreuve : « Souvent déçu par les
humains, jamais par mon chien ». En
Janvier 2001, Grasjacqs participait à une exposition de peinture organisée au
Pommereuil (59) par des étudiantes de BTS. Là, il entendit une brave dame dont
la fille appartenait à l’organisation
vanter les métiers d’un chien qu’elle venait d’acheter à Bousies, un village
voisin. Il ne put s’empêcher de tendre l’oreille par curiosité, par envie
peut être de recommencer une expérience. Le premier pas venait d’être
franchi, une nouvelle aventure allait voir le jour. Excellente en
communication, c’est elle qui aurait dû subir cette épreuve de l’examen
plutôt que sa progéniture, elle parvint facilement à convaincre nos deux
« sans chien » : -
Si vous voyiez comme
il est mignon avec sa queue toute droite, ses oreilles pointues, sa tête en
forme de chrysanthème ; on dirait une boule de poils. Vous pouvez
demander à voir l’élevage de M.Cornet, allez-y de ma part, ça ne vous engage
à rien. -
Rien que pour le coup
d’œil d’accord, mais on n’est pas prêt a remettre ça. -
« L’essayer, c’est
l’adopter », prend toute sa valeur dans ce cas de figure particulier.
Qu’ils étaient charmants ces petits monstres piaillant à vous fendre l’âme dans
le petit chalet en bois construit de toutes pièces par l’éleveur !
La propreté des lieux et le confort
imparti aux chiots inspiraient une énorme confiance à Grasjacqs et son
épouse ; les chiots s’approchaient sans crainte et déployaient des
trésors de câlinerie, grattant les chaussures de monsieur, escaladant la
jambe de madame, dodelinant de la tête comme dans la pub à la télé. C’en
était trop, la cause était entendue ; cependant, il fallait la
confirmation du maître de ces lieux : -
J’espère qu’ils ne
sont pas tous vendus car nous sommes vraiment décidés à vous en acheter un,
M.Cornet. -
Non, non,
rassurez-vous, au contraire, ils sont tous à vendre. -
L’affaire se corsait. Ils étaient tous plus beaux les
uns que les autres, se ressemblaient comme des jumeaux avec des différences
que seul un spécialiste peut percevoir. Madame Cornet, dans le creux de son
tablier, les transporta du chalet à la cuisine sur le carrelage de laquelle
elle les déposa. Six Ferrari hésitaient à prendre le départ de la délicate
course au choix ; légèrement à l’écart, une réplique miniature
vrombissant d’une mâle autorité, grilla soudain la politesse aux grosses
cylindrées et anticipa l’ordre du commissaire de course pour venir échouer
dans un parfait tête-à-queue aux pieds des Grasjacqs. Deux ou trois tonneaux,
fuite du réservoir sur les chaussures rutilantes de madame qui, contre toute
attente apprécie : -
C’est le plus petit de
la portée mais il a du caractère, j’apprécie. Moi, je n’aime pas trop les
« serpillières », qu’on commande au doigt et à l’œil. Un peu de
fantaisie rend le quotidien plus gai. Au fait, c’est un mâle ? -
Oui, oui, c’en est
un ; j’ai failli ne pas le mettre en vente car je ne savais pas s’il
allait survivre. A la naissance, il était si petit que les autres ne lui
laissaient pas la place pour téter sa maman ; ça m’inquiétait, je
l’aidais à se faire une place puis il s’est fait respecter malgré son petit
gabarit et maintenant il fait son petit chef ! Mais attention, comme il
a dû lutter, c’est un dominant et si vous ne vous imposez pas d’entrée de
jeu, il va vous dévorer tout cru ! On n’était plus très loin de la conclusion du marché.
Soudain, séducteur patenté, bébé modèle réduit planta ses yeux noirs dans le
regard attendri et légèrement humide de madame : « Elle est à point Jeannot,
j’emballe » pensait-il. Mieux que Guy Bedos et Aldo Maccione réunis pour
débaucher la minette. -
Si tu es d’accord, je
craque… En plus, il va être vraiment petit comme ceux qu’on voit à la télé.
Et moi, je ne résiste pas au coup de la tête, un coup à gauche, un coup à
droite : c’est Géant ! -
Réfléchissez bien, les
autres ont leur charme aussi. Ils auront un poil plus rêche et
pourront être épilés alors que le vôtre, enfin pour l’instant,
n’allons pas trop vite en affaires, aura un poil plus soyeux et ne
supportera pas l’épilation alors il faudra certainement le faire tondre. -
Tout çà, c’est du
détail, on verra bien à l’usage ; marché conclu, on vous l’achète. -
Il vous faudra
attendre sept semaines environ pour venir le chercher, c’est un minimum. Attente interminable passée tant bien que mal à choisir
le prénom de toutou, à acheter le trousseau complet dans une animalerie, à
ergoter sur les endroits stratégiques pour placer le panier, le bac double compartiment
imparti à la nourriture, à se demander que faire s’il pleure la nuit. Pour un
peu, les Grasjacqs se seraient crus vingt à vingt-cinq ans en arrière
quelques mois avant la naissance de leurs deux filles. Premier
Avril 2001. Jour J. Ce n’est pas une farce. Grasjacqs a fait la toilette du
carrosse, un 4x4 Suzuki, pour aller soustraire Saphir à son éleveur. Inutile
de préciser que la nuit a été courte et très agitée pour les futurs parents.
Arrivés tôt chez M.Cornet qui ne les attendait pas à une heure aussi matinale,
papa et maman règlent les formalités administratives incontournables certes
mais ô combien fastidieuses. Pouponner est bien plus agréable que de remplir
de la paperasse et écouter poliment les règles d’éducation que monsieur
« nounou Bousies » distille d’une voix lente et posée. D’autant que
la bibliothèque locale, fort bien documentée, a depuis belle lurette, levé le
voile sur le mystère qui entoure cette fascinante race de chien. Moment
d’intense émotion lorsque la famille agrandie quitte ce charmant village aux portes de l’Avesnois, Suzy en
tête serrant son « tiot » dans un bonnet, un coup de froid est si
vite arrivé en ce début de printemps, sous l’œil attendri de sa nourrice.
M.Cornet, bien qu’habitué à ce que ses chiots quittent l’élevage pour des
fortunes diverses ne demeure pas indifférent ; le timbre chevrotant de
sa voix le trahit : -
En tout cas, si vous
avez besoin que je vous le garde pour une raison ou pour une autre, n’hésitez
surtout pas : Saphir sera ici comme chez lui. Laborieuses les premières nuits : Moustachu ne
maîtrisant pas son nouvel environnement, réclamait sa maman comme tout
nouveau né. Heureuse surprise, cette situation délicate ne fut que l’affaire
d’une petite semaine, vraiment pas de quoi carburer aux somnifères pour ses
maîtres. De jour, les Grasjacqs n’eurent pas davantage à se plaindre de son
comportement : il était capable de demeurer seul sans commettre de
bêtises. En tout et pour tout, ses maîtres déplorèrent un petit bout de
tapisserie arraché dans le hall d’entrée, pas de quoi fouetter un chat ! Ses
pitreries revêtaient une tout autre tournure : à commencer par les
pantoufles de ses maîtres qu’il s’appliquait à cacher dans un coin et pas
toujours le même. Obligation de poser la poubelle du bureau sur le fauteuil
attenant sinon Saphir vide son contenu et s’amuse à le déchiqueter. La ruade
de plaisir après s’être soulagé l’intestin est encore maintenant l’un de ses
grands classiques et attention, çà déménage ! L’attaque en bonne et due
forme du bas de pantalon ou des lacets de papa surtout lorsque des intrus
viennent perturber la quiétude du cocon familial : « C’est de ta
faute, fallait pas les laisser entrer à la maison, c’est ma maison, pas la
leur », semble-t-il penser. Le Moustachu affectionne tout particulièrement
les bulbes de fleurs qui lui servent de dépuratif au grand désespoir de sa
maîtresse, comme on la comprend ! De temps à autre, lorsque les plus
résistantes sont écloses, il lui arrive d’en cueillir un bouquet sans
sécateur pour l’offrir aux gros oiseaux qui viennent, en quête de nourriture,
se poser sur la pelouse. Bien évidement, ceux-ci se méprennent sur les
intentions romantiques de notre dragueur impénitent aussi s’envolent-ils dans
un boucan d’enfer. Qu’à cela ne tienne, Julio Iglesias s’installe à la
porte-fenêtre de la cuisine, tulipes dans la truffe, pour déclarer sa flamme
à Suzy, la nouvelle élue de son cœur. Quatre pattes dans l’aventure est un
fervent téléspectateur. Museau posé sur le rebord du fauteuil, il suit les
émissions avec assiduité : c’est cela une vie de chien, mais il
entretient sa condition physique à raison de cinq kilomètres de marche tous
les jours, quelque soit le temps. C’est
pour toutes ses extravagances que les Grasjacqs sont profondément attachés à leur
petit bonhomme et que pour rien au monde ils n’auraient voulu entendre parler
de dressage au club cynophile. Saphir fait partie de la famille. Ils ne
concevraient pas les vacances sans l’emmener avec eux. Son maître a voulu lui
rendre hommage en écrivant cette nouvelle. Longue vie à Moustachu…
GRASJACQS |
LE CLOU DE LA SOIREE |
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J’entrais
récemment dans un restaurant où j’ai mes habitudes lorsque, sur le perron, je
tombai nez à nez avec un ancien collègue de l’école Normale. Il s’appelait
Follet et avait bien mérité son nom ! Accoutré
d’une casaque à gros clous, le nouveau venu détonnait sur l’élégante toilette
des autres clients. A sa vue, le maître d’hôtel haussait déjà le sourcil
gauche, prélude habituel au refoulement de tout indésirable. Je lui adressai
un geste apaisant et me hâtai d’inviter Follet à la table qui m’était
réservée, après l’avoir prestement délesté de sa cuirasse dans la pénombre du
vestiaire. Tandis
que mon camarade décortiquait son feuilleté au saumon avec un appétit féroce,
je m’employai de mon mieux à meubler un silence pesant, en évoquant mon
cheminement personnel ; lui ne m’écoutait guère, en extase devant les
fers à cheval et leurs clous décorant les murs de cette ancienne
maréchalerie : ma biographie d’instituteur rural n’a rien de
passionnant, je le concède ! Brusquement,
Follet plongea tête première sous la nappe ; tout en calmant à
grand-peine la tempête suscitée dans nos verres, je retins juste à temps nos
cailles aux raisins en partance pour un dernier vol plané. Mon voisin
réapparut, l’œil brillant, la moustache frissonnante comme un gazon de
printemps, exhibant dans sa paume une pointe tapissière échappée de mon
siège. Une pièce de monnaie antique ne l’aurait pas davantage
enthousiasmé ! « C’est mon premier clou de
la journée, balbutia-t-il, et je n’en ai pas encore de ce modèle ! » Dans
un flot intarissable, Follet me raconta par le menu l’histoire de sa passion.
Tantôt incrédule, interloqué ou railleur, je me contentais de hocher le chef
mais j’avais parfois du mal à réprimer un fou rire ! Cet
amour des clous lui était venu à la fin de son service militaire où le
médecin major lui avait signalé un manque de fer : c’est vrai que, dans
sa jeunesse, Follet avait toujours été d’une complexion anémique. Il avait
donc pris pour habitude de suçoter son clou chaque matin, sans exagération me
précisa-t-il, car il ne faut pas abuser des mets trop piquants. Insensiblement
avait grandi son intérêt pour les clous, une marotte inoffensive mais
envahissante et qui était devenue au fil des années son unique raison
d’exister. Après
son mariage, il avait tenté de faire partager cet amour à sa femme, mais
lorsqu’il lui avait proposé de le rejoindre sur sa planche de fakir, elle
avait aussitôt demandé le divorce : Allez savoir pourquoi ! Puis,
comme l’anatomie du délaissé s’accommodait mal de telles mortifications
solitaires, Follet s’était résigné à retourner à la planche. C’était déjà
plus confortable ! A
cette époque on lui avait conseillé de consulter un psychiatre ; Or, le
spécialiste ayant contracté le même virus avait profité des séances d’hypnose
pour subtiliser les pièces les plus rares de son client ! Il n’y avait d’ailleurs
aucune raison de poursuivre le traitement : Follet se sentait
parfaitement bien dans sa peau, excepté lorsqu’il restait quelques jours sans
trouver de pitance métallique ; il devenait alors irritable, mais
c’était rare. Un
récent pèlerinage au bon Saint Cloud n’avait pas eu plus d’effet pour calmer
cette fringale. Tout
en caressant sa trouvaille, Follet poursuivait, imperturbable : « J’aime les clous, et ils me le rendent bien.
Crois-moi, c’est une volupté sans égale de cueillir leur jolie pointe. Au
début, je ramassais tout, sans parti pris, les rivets, les vis, les boulons,
mais ces derniers étaient trop balourds, et les vis, plutôt vicieuses. Un
clou, au contraire, c’est tout simple, tout franc, tout droit, sans
entourloupettes. Je me consacre désormais à la sauvegarde de cette espèce,
c’est mon passe-temps favori, un plaisir gratuit, et crois-moi ce sont ces
joies-là qui sont les plus profondes ! J’apprécie
particulièrement les vieux, ceux dont personne ne veut, les étêtés, les
rouillés, les épointés et même les tordus. Ce sont les plus belles pièces de
ma collection. Dans le secret de ma chambre, je les astique, je les dénombre
et les recompte sans relâche ; le cœur battant, je les classe par forme,
par taille et par degré de vétusté ; je les répertorie sur un registre
suivant ces différents critères, en tenant compte bien entendu de la date et
du lieu de récolte : des calculs dont tu n’as pas idée ! Il faudra
venir admirer mon arsenal ! Tu
penses si les critiques les plus malveillantes ne m’ont pas été
épargnées ; quant aux sarcasmes dont on m’abreuve, je préfère les
ignorer ! En
revanche, j’éprouve de grandes joies ; en venant ici, par exemple, j’ai
eu le bonheur de traverser un passage clouté, un vrai, car ils se font
malheureusement de plus en plus rares ! Quelle symphonie, quel régal,
cette rencontre de mes chaussures ferrées avec leurs clous à bonne grosse
tête ! J’ai même fait la navette d’un
trottoir à l’autre une dizaine de fois pour écouter ce duo, au grand
désespoir du planton de service impuissant à verbaliser puisqu’il n’y avait
pas infraction… » De
plus en plus, mon camarade m’inspirait la pitié. Plusieurs fois, j’avais été
tenté de m’exclamer : « Sacré Follet, tu ne changeras
jamais ! » Mais cette fois, c’était grave ; à présent
j’étais triste : voilà un homme encore jeune, condamné d’ici peu à
végéter dans un asile d’aliénés, et je ne pouvais rien pour lui ! Je
décidai donc de lui offrir son repas et réglai l’addition, à moitié par
compassion, à moitié pour éviter un esclandre au cas où il aurait eu
l’intention de payer son écot avec les pointes dont se gonflait son
gousset ! Restait
à me débarrasser de cet hurluberlu qui me pressait d’aller, sur-le-champ,
visiter son musée… La
providence me vint en aide sous les traits d’une nouvelle cliente, yeux
pervenche, ainsi que je les aime, fossettes exquises, comme j’en raffole. Dès
que la jeune fille s’installa à la table voisine, Follet vit la chose en même
temps que moi : Sur le nez de la mignonne fleurissait une petite corne
blanche, un furoncle prêt à percer, pour ne pas le nommer. Je
m’éclipsai discrètement, laissant mon feu follet s’embraser pour ce clou mal
placé. Denise DUONG Béthune . |
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LE PUITS Alphonsine Legroux
était veuve. Elle l’était depuis de nombreuses années, à tel point que l’on n’imaginait
pas qu’elle eût pu jamais avoir été mariée. Il y a ainsi des gens côtoyés
dans le quotidien dont on a tout oublié du passé tant leur situation présente
est évidente et banale aux yeux de
tous. Alphonsine, avant de percevoir la pension de réversion de feu son mari
qui, si j’ai bonne mémoire s’appelait Georges, avait vécu hélas ! Et
grâce aux allocations que l’administration lui allouait pour ses enfants. Son
aîné au moment du décès s’apprêtait à fêter ses vingt cinq ans. Jean-Michel, c’était
son prénom, ne travaillait guère que quand l’occasion se présentait et quand
sa mère, excédée de le voir constamment traîner dans la maison, se mettait en
colère en le menaçant de le jeter dehors s’il continuait à rester ainsi
oisif. Oisif aurait été encore
un moindre mal car, et comme cela se passe bien souvent dans ces navrantes
situations, il invitait à la maison les meilleurs copains, choisis, triés sur
le volet qui ne pensaient qu’à s’amuser et faire les quatre cents coups.
La cour de la pauvre demeure devenait le lieu de prédilection de mobylettes
en réparation, de vélos en mal de voyages et de bien d’autres ustensiles
encore dont l’origine, la plus souvent douteuse, allait de pair avec la
destination à laquelle ils étaient promis. Le fait qu’il n’y
ait plus d’homme, entendez de père à la maison, y perturbait particulièrement
l’ordre et la régularité. Jean-Michel rentrait selon les jours tard le soir
ou tôt le matin. Plus d’une fois on l’avait retrouvé dans le fossé qui borde
la route communale menant au village. Sa mère le savait qui le laissait
pourtant se reverser un verre de vin après le dîner, quand elle s’apprêtait à
débarrasser la table. Elle le savait, elle le voyait, mais il n’avait plus
quatorze ans comme son frère Rémi, « el’tiot » comme on disait,
pour l’en empêcher. Et puis tout cela était si dur, si compliqué dans sa tête
et dans son corps : Jean-Michel, « el’tiot », les deux
jumelles, ses deux petites filles que naguère encore elle serrait contre elle
en chantant : « Où est-ce qu’elle est ma Bertille, où est-ce
qu’elle est ma Julie ? » juste pour les aimer, juste pour les
entendre rire encore une fois. Et dire que dans six
mois Julie serait à son tour maman ! Bien sûr, à force d’aller voir les
garçons au village… Tout cela était si dur ! C’est qu’elle avait pleuré,
et les jours suivants, quand sa petite lui avait annoncé la nouvelle. Et
forcément l’idée de l’avortement avait traversé les esprits et les cœurs,
comme si supprimer l’effet eût pu avoir quelque influence sur la cause !
Mais non, dans la famille on ne jouait pas à ces choses-là et la vie est plus
forte que la mort. Pourtant, en cachette de ses enfants et surtout de
Jean-Michel, parfois, elle se versait un verre de vin. La maison de la
famille Legroux se tenait petite, à l’écart du village et la fenêtre de la
cuisine donnait sur la cour que couvrait en partie de son ombre égale un
noyer plus que centenaire. C’est là que l’été, autour d’une longue table en
bois, la famille se tenait pour prendre les repas, notamment ceux du midi et
du soir, ces longs soirs où les ombres lentes entraînent dans leur mouvance
ce qu’il reste de la journée. Au fond de la cour, sur le côté gauche, il y
avait le puits. Il était ancien,
fait en pierres taillées qui étaient devenues noires avec le temps. On
utilisait l’eau qu’on en tirait pour les divers travaux domestiques, une eau
dont le niveau comme pour tous les puits, variait inévitablement selon la
sécheresse ou la pluviosité des saisons. L’été, le puits était précieux.
Lorsque la chaleur devenait intense et que le soleil n’admettait qu’à contre
cœur que les hommes et les bêtes, en le fuyant, s’opposent à son orgueilleuse
torpeur, il devenait un allié propice à la fraîcheur recherchée. Jean-Michel
avait pris l’habitude d’accrocher une bouteille de vin, le plus souvent du
rosé, et de la descendre mécaniquement au fond, dans l’eau glacée. Ainsi le
breuvage n’en étanchait que mieux la soif. L’aîné des Legroux avait l’art de
passer la corde autour du goulot, de serrer et de laisser filer le tout dont
l’arrivée à destination était ponctuée d’un « plouc » discret. Il
faisait rarement redescendre moins d’un tiers de bouteille, préférant
s’octroyer le reliquat et relancer dans le noir un plein contenant, toute
manipulation jugée inutile étant ainsi évitée… Alors, quand il
faisait plus chaud encore et que le rosé était encore plus frais, tel un
arquebusier chargeant le fût de son arme et comme pour marquer le départ d’un
nouvel assaut, un bras levé vers le ciel il s’écriait : « Pour le
rosé ! Anjou ! Feu ! ». Cet après-midi-là,
le dernier mercredi du mois de juillet, Jean-Michel n’avait pas lancé à
travers l’espace son traditionnel hallali. Sans doute parce que, cet
après-midi-là, il faisait encore plus chaud que d’habitude et que le rosé,
plus glacé que jamais, n’avait fait qu’augmenter la température déjà lourde
et moite. La bouteille à sa place habituelle était pleine, accrochée à la
corde, prête à être abandonnée à la profondeur du puits. Quand, tout à coup,
dans un mouvement imperceptible elle se détacha, laissant le nœud de la corde
stupidement inutile. Jean-Michel hébété se mit à chercher du regard la
bouteille flottant à présent à la surface de l’eau. Il faisait chaud,
trop chaud. Le feu aux tempes, il s’accorda à cette idée qui venait de lui
traverser la tête : descendre chercher la bouteille ! Sans plus
attendre, il saisit la corde et se la passa autour de la taille. D’un coup
sec il serra le nœud qu’il venait de terminer et, comme poussé par quelque
chose de plus fort que lui, monta comme il put sur la margelle du puits. Il
n’y avait personne cet après-midi-là à la maison, sinon… Mais
qu’importe ? Il fallait coûte que coûte aller chercher cette bouteille à
cause de la chaleur, malgré la chaleur qui rendait difformes toutes choses.
Il agrippa à deux mains la corde salvatrice et d’un saut se laissa tomber
dans le trou. Un « plouf » énorme s’ensuivit. ------------- Le mardi suivant
c’est-à-dire six jours plus tard, la famille ainsi que quelques habitants du
village venus pour témoigner de leur sympathie sinon de leur curiosité,
accompagnaient le corbillard au cimetière communal. Il faisait encore
très chaud ce jour-là. Jean-François SAUTIERE |
BLAQUES DINS L’ COIN |
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RAMINTUV’RIES L’ TERRI D’ MES DIX ANS |
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Min terri, i n’arsonnot pas à eun’ montanne, Plachée au mitant d’él’ plaine, comme eun’
citadelle. Ch’étot eun’ long’ colline pleine ed’ creux et d’
dos d’âne, Aveuc un tapis d’herbe et des bouquets d’archelles. Quand que j’ l’ai découvert, j’ venos d’avoir dix
ans. Comme tous ches gosses, j’ cachos un aut’ terrain d’
jeux : In n’ pouvot pos toudis s’ berdéler dins ches camps, Et faire el diab’ dins l’ cité, cha v’not
dingereux ! V’là pourquo, qu’aveuc des comarates, eun’ bell’
fos, In a sauté d’eun’ feull’té pa d’ zeur ech grillach’, Quate à quate, in a grimpé chell’ pint’ jusqu’in
haut Et, qu’ d’un seul cop in a vu tout tiot, nou
villach’ ! Mais d’ l’aut’ côté, ch’étot bin pus
intéressant : Ch’ terri-là i longeot ches lines ed’ quemin d’ fer, Dù qu’ ches trains d’ voyageurs arrivotent in
sifflant, Pour passer in d’ zous nous, aveuc un bruit d’infer. Combin d’ fos qu’in l’ z’a attaqués ches trains
express’, Muchés dins ches taillis tout in haut d’ nous terri, Ou bin, in dégringolant l’ pinte à tout’ vitess’ L’ fusil in bos dins s’ main, in poussant des grands
cris ! Mais fallot fair’ vite pour armonter nous mucher Quand, soudain à tout’s pédales ech’ garde arrivot. In savot qu’eun’ balle ed sel cha n’ pouvot pas
tuer, Mais qu’ cha brûlot quand in l’ prenot dins l’ bas
du dos ! Quand qu’in n’ juot pas à « l’ charge d’él
brigade légère », In grattot l’herbe et ches caillots qui étot’nt pa
d’ zous Pour dénicher des empreintes ed’ feulles ed’
fougères Qui avot’nt poussé des milliers d’années avint nous. Ch’est quand mêm’ formidab’, l’histoire ed’ chés
plant’s-là : Alles ont grandi su l’ terr’ bin pus haut equ’ nous
chênes Avant d’êtr’ noyées, infouies au fond d’un magma Et pis d’êtr’ armontées, figées, pa d’ zeur chés
plaines ! V’là pourquo, jé n’ peux l’oublier min viux
terri : I fait partie d’ mes jonnes années d’ gosse ed’
coron. Su sin dos, j’ai caracolé comme un cabri, Bin avant d’aller, mi aussi, ramper au fond ! Jacques HUET La Flamengrie (02) |